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Élise, le visage marqué par la fatigue et les émotions contradictoires qui la submergeaient, poussa la vieille grille rouillée du portail de Valombre. Son village natal se tenait devant elle, presque figé dans le temps, mais étrangement différent de ce qu'elle avait gardé en mémoire. Cela faisait plus de dix ans qu'elle n'avait pas mis les pieds dans ce coin reculé de la campagne, et pourtant, l'atmosphère familière de Valombre lui revint avec une force déconcertante.
Une légère brume enveloppait les maisons, se lovant autour des bâtiments comme si elle essayait de protéger le village d'un secret ancien.
Le vent froid d'automne lui mordait le visage tandis qu'elle avançait sur la route principale pavée, cette même route qu'elle empruntait étant enfant pour se rendre à l'école. Mais aujourd'hui, tout semblait différent, comme si une ombre planait sur chaque coin de rue. Ses pas résonnaient dans le silence pesant, amplifiés par l'absence de toute vie visible autour d'elle. Il n'y avait pas d'enfants qui jouaient, ni de bruits de chariots passant dans les ruelles. Valombre paraissait abandonné, ou du moins en sommeil.
Pourquoi était-elle revenue ? La question n'arrêtait pas de résonner dans son esprit depuis qu'elle avait quitté la grande ville pour revenir ici. C'était la lettre. Cette maudite lettre. Un simple morceau de papier jauni, découvert par hasard dans les affaires de sa mère, qui mentionnait la disparition mystérieuse de cette dernière dans des termes vagues et alarmants. Sa mère, qu'elle n'avait plus vue depuis des années, vivait toujours ici à Valombre, refusant de quitter ce village étrange malgré les nombreuses sollicitations d'Élise pour venir vivre avec elle en ville. Maintenant, elle était partie, sans explication. Et Élise, dans une impulsion qu'elle ne comprenait pas vraiment, avait ressenti le besoin irrésistible de revenir pour comprendre ce qui s'était passé.
Elle atteignit enfin la place centrale, là où se dressait fièrement l'église du village, autrefois cœur battant de la communauté. Maintenant, même cette bâtisse imposante semblait ternie par le temps. Les vitraux, autrefois éclatants de couleurs vives, étaient couverts de poussière et de mousse. Le clocher, qui sonnait autrefois les heures, restait étrangement muet. Un sentiment d'abandon planait lourdement sur tout ce qu'elle voyait.
Mais ce n'était pas seulement l'aspect visuel qui la dérangeait. Il y avait autre chose, quelque chose qu'elle n'arrivait pas à définir. Une sorte de tension invisible qui s'insinuait dans l'air, une présence qu'elle sentait sans pouvoir l'expliquer. Ses instincts lui murmuraient qu'elle n'était pas seule, que quelque chose ou quelqu'un l'observait, tapi dans l'ombre. Une vague de malaise la traversa.
« Bonjour, mademoiselle Élise. »
Elle sursauta. La voix grave et rauque d'un vieil homme la fit se retourner brusquement. C'était M. Bertin, l'épicier du village, qui venait de sortir de l'obscurité d'une petite ruelle. Son visage ridé et son dos voûté montraient les signes d'une vie difficile, mais ses yeux restaient perçants, comme s'il pouvait lire dans l'âme des gens. Il l'observait avec une étrange intensité, ce qui ne fit qu'accroître l'inconfort d'Élise.
« M. Bertin... » murmura-t-elle, ne sachant pas quoi dire de plus.
« Cela fait bien longtemps que vous n'êtes pas revenue parmi nous. Je me demandais quand vous alliez vous manifester. »
Le ton de sa voix était neutre, mais quelque chose dans sa manière de parler laissait transparaître une forme de reproche implicite. Comme si son retour tardif avait une signification qu'Élise ne comprenait pas encore.
« Je... Je suis revenue pour ma mère. Vous savez ce qui s'est passé ? Personne ne répond à mes lettres, et je n'ai eu que des nouvelles fragmentées. »
Le visage de M. Bertin se crispa un instant avant qu'il ne secoue la tête d'un air grave. « Ce village n'est plus ce qu'il était, mademoiselle. Les choses ont changé ici. Les gens ont changé. Votre mère... elle a disparu il y a plusieurs mois, et depuis, les gens sont encore plus méfiants qu'avant. Ils restent enfermés chez eux, surtout la nuit. »
Élise fronça les sourcils. « Pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe exactement ici ? »
Il la regarda avec un mélange de pitié et de tristesse avant de répondre d'une voix basse, presque un murmure : « Les vieilles légendes... Elles sont revenues. »
Un frisson parcourut l'échine d'Élise. Les légendes. Elle se souvenait vaguement de ces histoires que les anciens racontaient autour du feu lorsqu'elle était enfant. Des récits sombres de créatures tapies dans la forêt, des hurlements effrayants pendant les nuits de pleine lune, et des disparitions inexpliquées. Mais pour elle, tout cela n'était que des histoires pour effrayer les enfants. Rien de plus.
« Ce ne sont que des contes pour faire peur aux gens, non ? » tenta-t-elle d'affirmer, mais sa voix manquait de conviction.
M. Bertin la fixa longuement avant de répondre. « Vous le pensiez peut-être. Mais ceux qui vivent encore ici savent que ces légendes ne sont pas que des contes. Depuis la disparition de votre mère, d'autres choses se sont produites. Des animaux retrouvés éventrés dans les bois, des hurlements qui résonnent pendant la nuit, des villageois qui disparaissent sans laisser de traces... »
Élise resta silencieuse, tentant de traiter cette avalanche d'informations. Les légendes... des loups-garous, si elle se souvenait bien. Mais cela ne pouvait être réel. C'était impossible. Et pourtant, quelque chose dans le regard de M. Bertin et dans l'atmosphère oppressante du village semblait indiquer le contraire.
« J'ai besoin de réponses, M. Bertin. Il doit bien y avoir une explication logique à tout cela. Ma mère... elle n'aurait pas juste disparu sans raison. »
« Si vous cherchez des réponses, allez voir la vieille Marguerite. Elle a toujours eu un don pour voir au-delà des apparences. Mais prenez garde, mademoiselle. Vous vous aventurez sur un terrain dangereux. »
Sur ces paroles énigmatiques, M. Bertin s'éloigna lentement, laissant Élise seule sur la place. Elle serra ses bras autour d'elle-même, comme pour se protéger du froid et de cette étrange sensation d'être observée. La vieille Marguerite... Elle se souvenait d'elle. Une vieille femme que tout le monde dans le village évitait, la considérant comme une sorte de sorcière, même si personne n'avait jamais osé le dire à voix haute.
Mais si c'était la seule qui pouvait l'aider, elle n'avait pas vraiment le choix.
Élise se mit en route vers la maison de Marguerite, située à la lisière du village, près de la forêt. En chemin, elle se remémorait les histoires que sa mère lui racontait à propos de cette femme. Marguerite avait toujours eu une réputation étrange, même parmi les autres villageois superstitieux de Valombre. Elle vivait seule, éloignée de tout le monde, et semblait toujours savoir plus que ce qu'elle laissait paraître.
Alors qu'Élise approchait de la petite maison délabrée de Marguerite, elle sentit son cœur s'accélérer. La cabane semblait presque fondue dans la forêt, comme si la nature avait lentement commencé à la dévorer. Des plantes grimpantes s'enroulaient autour des murs en bois, et une épaisse fumée s'échappait de la cheminée, signe que Marguerite était bien là.
Elle s'arrêta devant la porte, hésitante. Devait-elle vraiment entrer ? La dernière fois qu'elle avait vu cette vieille femme, elle n'était qu'une enfant, et la simple vue de Marguerite l'avait terrifiée. Mais maintenant, elle n'avait plus d'autre choix.
Prenant une grande inspiration, elle leva la main et frappa trois fois à la porte. Un instant de silence suivit, puis la porte s'ouvrit lentement, révélant la silhouette voûtée de Marguerite. La vieille femme la regarda avec des yeux perçants, et un sourire énigmatique se dessina sur son visage ridé.
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