Un moment d'aveuglement

Un moment d'aveuglement

promotion

5.0
avis
2.2K
Vues
95
Chapitres

Retrouver son premier amour près de trente plus tard réserve parfois bien des surprises. La narratrice ne va pas tarder à le découvrir. À ses dépens. L'amour, le temps qui grignote, l'âge qui gagne, les certitudes qui s'effondrent, les illusions qui s'envolent, cette histoire explore le chemin et les remises en question de ce personnage. Un évènement tragique lui permettra de prendre conscience de son aveuglement... * Ce roman retrace la quête existentielle d'une femme de cinquante ans qui affronte des épreuves difficiles, s'effondre parfois mais finit toujours par se relever. L'auteure Mère, compagne, amoureuse des chats et adepte de vélo, Anarita River est agrégée d'anglais en exercice dans un lycée parisien. Lectrice assidue passionnée de littérature, de théâtre et de cinéma, elle est très investie dans son métier et dans la réussite de ses élèves. Passionnée par l'enseignement et la transmission du savoir, Un moment d'aveuglement est sa première oeuvre littéraire personnelle. Illustration: TonK

Chapitre 1 No.1

Deuxième partie

« 'But love is blind, and lovers cannot see. »

William Shakespeare

Le Marchand de Venise, Acte II, sc 6. (1596-97)

« Tu sais pour se mettre à aimer quelqu'un, c'est une entreprise. Il faut avoir une énergie, une générosité, un aveuglement... »

Jean-Paul Sartre

La Nausée, (Gallimard. 1938)

« Ce qui nous crève les yeux nous rend aveugles. »

Miss Tic.

Nous avons rendez-vous à l'Amour Fou. À deux pas du métro Saint-Paul.

Il neige.

Tu es le premier amour.

Trente-sept ans sans t'avoir pour ainsi dire jamais revu.

Trente-sept ans.

D'absence et d'attente.

D'attente

Tu viens d'appeler à deux reprises pour t'assurer de ma venue.

J'ai hésité à te rejoindre.

Il neige.

J'ai hésité.

Tu as dit que tu m'embrassais.

Déjà.

Je t'embrasse déjà.

Tu as dit je suis ému.

Ému par toi.

Tu as dit j'ai changé. Peut-être, je suis moins dur qu'avant. Peut-être.

Voilà ce que tu as dit.

Il neige.

J'ai hésité à te rejoindre, vendredi d'hiver, milieu d'après- midi, courses à finir, copies à finir, tâches diverses à finir.Pareil. Toujours pareil, pareil, pareil. Depuis des années. Pareil. Appréhension confuse. Poids du passé. Souvenirs en rafales. Angoisse chevillée au corps, au cœur, partout, à l'intérieur. Au cœur. À l'intérieur.

Peur diffuse.

- Peur de moi ? Tu n'as tout de même pas peur de moi !

J'ai changé

Ta voix s'inquiète au téléphone.

- De quoi as-tu peur ? Tu viendras quand même ? Tu ne te méfies quand même pas !

Bien sûr, je viendrai. Je viendrai.

La neige tombe en dentelle. Les contours de la place s'estompent. Seule la musique du manège perce, berce le brouillard. Guide mes pas. Mon manteau est lourd. Lourdes, mes bottes. Lourdes. J'avance. Mais lentement. Mais vers toi. Vers toi.Je te retrouve. Enfin.Je n'ai cessé de t'attendre.

Oui, tout ce temps passé à t'attendre.

Je te reconnais aussitôt.

Arrêt sur image.

À cinquante mètres de toi, guère plus. Tu ne me vois pas. Pas encore.

Tune me vois pas.

Je m'approche.

Même silhouette adolescente. Même façon de te tenir. De scruter la rue. Je t'aperçois, tu guettes, me guettes, corps un peu tendu, un peu penché en avant. Maladroit. Comme avant lorsque nous avions rendez-vous. Avant.Et que j'arrivais en retard. (J'étais souvent en retard alors.Tu craignais toujours que je ne vienne pas.) Temps encore de faire demi-tour. De prétendre que je ne suis jamais venue. De te prévenir. Rapidement. Mais rapidement. De t'éviter. De tout éviter

J'observe mon reflet dans le miroir d'une vitrine. Maquillage dilué par le froid. Visage rougi. Cheveux collés par la neige. Corps engoncé dans un manteau trop lourd. Tu as quitté une jeune fille et rappelé une femme de cinquante. Vrais clichés : poids des ans, marques du temps, visage creusé, corps avachi...Vas-tu me reconnaître ? Je me tapote la figure, me mords les lèvres, replace une mèche derrière l'oreille. Respire. Je prends le temps de me rassembler. Respire.

Tu regardes dans l'autre direction.

Tout peut encore basculer.

Dans deux jours, c'est Noël. La foule se presse rue Saint-Antoine.La neige poudre le trottoir. L'obscurité descend vaillante en dépit des guirlandes illuminées, des étoiles argentées et des enseignes lumineuses. Je me résous enfin. Je glisse. Au ralenti. Et c'est vers toi.Vers toi.Des années à attendre. Je devrais être joyeuse. J'ai peur.

Tu n'as tout de même pas peur de moi ?

Les passants se dissolvent autour de nous. Le trottoir se vide. Comme en rêve. Nous voilà seuls.

Seuls ?

Fondu enchaîné.

Zoom avant.

Un pas.

Un autre encore.

Et puis un autre.

Je pourrais rebrousser chemin.

Tout peut basculer.

À l'instant, je pourrais partir.

Sans épiphanie.

C'est aujourd'hui.

C'est hier.

Les bruits s'estompent.

Je retarde nos retrouvailles

Je vais t'abandonner tout de suite, sur ce bord de trottoirTirer un trait définitif. Garder cette image de toi à m'attendre transi sous la neige. Ne plus jamais te revoir, ne plus souffrir. Ne pas m'encombrer de ta présence sous le porche d'un café. Te laisser à ta vieRetourner à la mienne. Fuir. Dès maintenant. Il est encore temps. Tu ne me vois pas.

La neige tombe plus dru.

Le froid se déploie.

Trop tard !

Tu te retournes.

Et nous voilà soudain face à face. Empêtrés de nous-mêmes. Confus. Étonnés. Nous nous embrassons sur la joue comme deux vieux copains. Silence. Tu as conservé la même allure juvénile à plus de cinquante ans. Et je me sens si âgée soudain, si lasse, si encombrée de moi-même.

Je te retrouve, pareil. Pareil. Seize. Dix-sept ans. Dix-huit. Émotions, réminiscences, reviviscence, sentiments. Rien n'a changé comme si ces presque quarante ans d'éloignement s'étaient figés, comme si rien n'était advenu entretemps, télescopage des heures, des années, de nos vies distinctes. Nous sommes autres à l'identique de notre première rencontre. Je suis en territoire connu. Avec toi, je suis en territoire connu. Certaine que rien ne peut m'arriver et que tout, tout peut recommencer. La force de l'évidence est telle. Comme dans les vraies amitiés ou les amours véritables, ou les deux à la fois, nous reprenons là où nous nous sommes arrêtés, un jour, un mois, un siècle plus tôt. Pérennité des visages, des mots, des gestes, l'âge importe peu, le temps n'a aucune prise. Car nous avons été l'un pour l'autre l'alchimiste et l'or, la terre et le sel, le vase et l'eau, le verre et le vin, le contenant et le contenu, nous avons été cela l'un pour l'autre, deux et uniques, ensemble et séparés, liés et défaits, errants et incarnés et tout cela et bien plus. Nous avons été cela. Tu le sais. Tu le sais.

Ton premier mot résonne comme un regret :

- Blonde !

Je tente de me justifier.

- Oui, c'est plus doux au visage, tu ne trouves pas ? À mon âge, le brun durcit les traits.

Je me cherche des circonstances atténuantes.

Déjà ?

Déjà.

Continuer

Autres livres par promotion

Voir plus

Inspirés de vos vus

SOUS SA POSSESSION : Une romance érotique avec un milliardaire

SOUS SA POSSESSION : Une romance érotique avec un milliardaire

Viviene
5.0

Avertissement : Cette histoire contient des thèmes matures et du contenu explicite destiné à un public adulte (18+). La discrétion du lecteur est conseillée. Ce roman contient des éléments tels que des dynamiques BDSM, des contenus sexuels explicites, des relations familiales toxiques, des scènes de violence occasionnelles et un langage cru. Ce n'est pas une romance douce. C'est intense, brut et désordonné, et explore le côté sombre du désir. ***** « Enlève ta robe, Meadow. » « Pourquoi ? » « Parce que ton ex regarde », a-t-il dit en se calant dans son siège. « Et je veux qu'il voie ce qu'il a perdu. » ***** Meadow Russell était censée se marier avec l'amour de sa vie à Vegas. Mais elle a surpris sa sœur jumelle en train de coucher avec son fiancé. Elle noyait son chagrin dans l'alcool au bar. Une erreur en état d'ivresse est devenue réalité. Et l'offre d'un inconnu s'est transformée en un contrat qu'elle a signé avec des mains tremblantes et une bague en diamant. Alaric Ashford est un diable en costume sur mesure. PDG milliardaire, brutal, possessif. Un homme né dans un empire de sang et d'acier. Il souffre également d'une condition neurologique : il est insensible au toucher. Ni les objets, ni la douleur, ni même le toucher humain. Jusqu'à ce que Meadow le touche, et il ressent tout. Et maintenant, il la possède. Sur le papier et dans son lit. Elle veut qu'il la détruise. Prendre ce que personne d'autre n'a pu avoir. Il veut le contrôle, l'obéissance... la vengeance. Mais ce qui commence comme un marché se transforme lentement en quelque chose que Meadow n'avait jamais vu venir. Obsessions, passions dévorantes, secrets qui n'auraient jamais dû refaire surface, et une douleur du passé qui menace de tout briser. Alaric ne partage pas ce qui lui appartient. Ni son entreprise. Ni sa femme. Et encore moins sa vengeance.

Renaissance de la femme adultère

Renaissance de la femme adultère

Honey Goldfish
5.0

Sarah Dans ma première vie, j'ai trahi mon mari et renié toutes les valeurs que mon père m'avait enseignées. Je détestais l'homme que mon père avait choisi pour moi. J'étais prête à tout pour divorcer, même à traîner son nom et aussi le mien dans la boue. Dans ma première vie, j'ai fait confiance aux mauvaises personnes. Je prenais mes ennemis pour des amis et l'homme dont je m'étais entichée n'était en fait qu'un menteur, un voleur, un tricheur! Dans ma première vie, j'ai tout perdu. Mon héritage, la compagnie que mon père avait mis des années à construire... et même tous mes rêves se sont envolés en fumée! Tout ça pour quoi? À cause d'une obsession. Non! De mon infatuation! Dario Marconi ne méritait pas que je lui sacrifie toute ma vie. Je le découvris à mes dépens, le jour de ma mort! Ce n'est que dans mes derniers instants de vie que j'ai réalisé qu'un seul homme m'avait réellement aimée... au point de se sacrifier pour tenter de sauver ma vie, se jetant dans les flammes! Ses yeux bleu gris acier et l'expression de son visage au dernier instant, quand cet édifice en feu s'est effondré sur nous, me hanteront toujours. Damien Lockwood, si nous nous retrouvons dans notre prochaine vie, je te promets cette fois de t'aimer et de te chérir jusqu'à la fin de mes jours! Mais... qui aurait dit que la vie m'offrirait vraiment une seconde chance? Cette fois, je ne referai pas les mêmes erreurs. Cette fois... je vais me racheter du mal que j'ai fait à tous mes proches... et toi le premier, mon cher ex-mari! Bref, cette histoire est l'histoire secrète de la Renaissance d'une femme adultère.

Dette de Plaisir: J'ai payé le Milliardaire

Dette de Plaisir: J'ai payé le Milliardaire

法语作者
5.0

Vespérine vit dans l'ombre, composant secrètement les plus grands succès de la pop star Sereine sous le pseudonyme d'Iris. Mariée à Julien D'Argent, elle pense avoir trouvé un refuge, ignorant que son talent est pillé et son identité effacée par l'homme qu'elle aime. Tout bascule lorsqu'elle découvre que son mariage n'était qu'une manœuvre cruelle de Julien pour la distraire pendant qu'il dépouillait l'entreprise de ses parents. Elle réalise avec horreur qu'il la trompe avec Sereine et qu'il a orchestré la ruine de sa famille pour s'emparer de leur héritage. Chassée de son propre foyer et privée de ses comptes bancaires, Vespérine devient la cible d'une campagne de haine mondiale lancée par Sereine. Accusée d'extorsion et traquée par les paparazzis, elle se retrouve seule dans un motel miteux, tandis que Julien utilise la mort tragique de ses parents pour tenter de l'emprisonner à nouveau. Elle ne comprend pas comment l'homme en qui elle avait placé toute sa confiance a pu transformer sa vie en un tel enfer. Pourquoi l'avoir piégée dans cette union mensongère alors qu'il préparait déjà sa chute et le vol de son identité artistique ? Prête à tout pour obtenir justice, elle s'allie avec Damien, le frère ténébreux et redouté de Julien. En découvrant le secret médical de cet homme puissant, elle décide de devenir son unique remède : Iris va enfin révéler son vrai visage pour détruire l'empire de ceux qui ont volé sa voix et sa vie.

Chapitres
Lire maintenant
Télécharger le livre