Quatre ans après la mort de Paul, je suis retournée sur sa tombe, un petit bouquet de fleurs sauvages à la main. Le gardien m' a dit qu' il avait été déplacé, qu' il reposait désormais dans une concession familiale, "plus prestigieuse". J' ai découvert une nouvelle stèle de marbre noir, gravée de son nom, Paul Martin, et juste en dessous, celui de Sophie Laurent, sa "muse", morte deux ans après lui. Mon bouquet a glissé de mes doigts, ma vision s' est brouillée, et tout est revenu : la trahison, l' humiliation, la douleur insupportable de ce jour où tout avait basculé. Ce n' est pas la mort qui nous avait séparés, mais bien son abandon, rendu éternel par ce marbre froid. Huit ans plus tôt, un médecin m' annonçait ma fausse couche, laissant un vide immense dans mon ventre et mon cœur. Paul n' était pas venu, trop occupé à calmer sa muse, Sophie, incapable d' écrire. Quand je suis rentrée à l' appartement, il m' a reproché ma fragilité, ma faute si le bébé n' était plus là, sans la moindre tristesse. Le lendemain, il a essayé de se racheter avec un collier vide de sens, avant de me demander de vendre la broche de ma grand-mère pour financer le voyage de Sophie à Genève. Pour la première fois, j' ai dit "Non" , et notre maison, jadis mon refuge, est devenue le théâtre de sa fureur aveugle. Il s' est enfui, claquant la porte avec violence, me laissant seule au milieu des débris de notre vie. Dans ce chaos, j' ai trouvé la clarté : j' allais partir, emportant seulement mes pinceaux, mes rêves oubliés et cette broche, dernier lien avec ma dignité. Son aveu glaçant, "elle a fait une fausse couche ce matin, elle a perdu notre enfant," alors que j' étais là, devant tous, m' a achevée. Il a transformé notre drame le plus intime en un spectacle public pour me discréditer, pour la protéger, elle. Le silence assourdissant, les regards de pitié, la certitude de sa trahison ont fait s' éteindre en moi le dernier espoir, la dernière étincelle d' amour. Puis, ma voix, étrangement calme, a coupé le silence : "C' est vrai, j' ai perdu notre enfant ce matin, seule. Et maintenant, je viens de perdre mon mari." "C' est fini, Paul. Définitivement. Je veux le divorce." Sans un regard en arrière, j' ai marché, laissant dix ans de ma vie derrière moi, vers Paris, vers l' inconnu, vers la liberté.
Quatre ans après la mort de Paul, je suis retournée sur sa tombe, un petit bouquet de fleurs sauvages à la main.
Le gardien m' a dit qu' il avait été déplacé, qu' il reposait désormais dans une concession familiale, "plus prestigieuse".
J' ai découvert une nouvelle stèle de marbre noir, gravée de son nom, Paul Martin, et juste en dessous, celui de Sophie Laurent, sa "muse", morte deux ans après lui.
Mon bouquet a glissé de mes doigts, ma vision s' est brouillée, et tout est revenu : la trahison, l' humiliation, la douleur insupportable de ce jour où tout avait basculé.
Ce n' est pas la mort qui nous avait séparés, mais bien son abandon, rendu éternel par ce marbre froid.
Huit ans plus tôt, un médecin m' annonçait ma fausse couche, laissant un vide immense dans mon ventre et mon cœur.
Paul n' était pas venu, trop occupé à calmer sa muse, Sophie, incapable d' écrire.
Quand je suis rentrée à l' appartement, il m' a reproché ma fragilité, ma faute si le bébé n' était plus là, sans la moindre tristesse.
Le lendemain, il a essayé de se racheter avec un collier vide de sens, avant de me demander de vendre la broche de ma grand-mère pour financer le voyage de Sophie à Genève.
Pour la première fois, j' ai dit "Non" , et notre maison, jadis mon refuge, est devenue le théâtre de sa fureur aveugle.
Il s' est enfui, claquant la porte avec violence, me laissant seule au milieu des débris de notre vie.
Dans ce chaos, j' ai trouvé la clarté : j' allais partir, emportant seulement mes pinceaux, mes rêves oubliés et cette broche, dernier lien avec ma dignité.
Son aveu glaçant, "elle a fait une fausse couche ce matin, elle a perdu notre enfant," alors que j' étais là, devant tous, m' a achevée.
Il a transformé notre drame le plus intime en un spectacle public pour me discréditer, pour la protéger, elle.
Le silence assourdissant, les regards de pitié, la certitude de sa trahison ont fait s' éteindre en moi le dernier espoir, la dernière étincelle d' amour.
Puis, ma voix, étrangement calme, a coupé le silence : "C' est vrai, j' ai perdu notre enfant ce matin, seule. Et maintenant, je viens de perdre mon mari."
"C' est fini, Paul. Définitivement. Je veux le divorce."
Sans un regard en arrière, j' ai marché, laissant dix ans de ma vie derrière moi, vers Paris, vers l' inconnu, vers la liberté.
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