Léa Martin, 21 ans, a consacré toute son énergie à décrocher une place dans l'une des universités les plus prestigieuses de France : la Sorbonne. Entre les études intensives et les petits boulots pour économiser, Léa n'a jamais vraiment connu ce que c'était d'avoir des amis ou une vie sociale épanouie. Jusqu'à ce qu'elle rencontre Camille, sa nouvelle colocataire, aussi extravagante qu'attachante. Camille lui ouvre les yeux : la vie ne se résume pas aux dissertations et aux partiels. Il y a aussi les fêtes, les rires, les amitiés fortes... et l'amour. Mais le cœur de Léa ne vibre que pour une seule personne, et elle sait qu'elle ne peut pas l'avoir. Parce que Gabriel Dumont n'est pas seulement le frère aîné de Camille, et donc strictement interdit. Il est aussi son professeur de littérature.
Un nouveau départ
Léa tira une dernière fois sur la poignée de sa valise, l'entraînant à l'intérieur du modeste appartement qu'elle partagerait désormais avec une inconnue. Son cœur battait plus vite qu'elle ne l'aurait voulu. L'excitation et l'appréhension se mêlaient en elle, formant un nœud indéfinissable dans sa poitrine.
L'appartement était simple, fonctionnel, sans fioritures. Un salon exigu, une cuisine ouverte et deux chambres séparées par un couloir étroit. C'était loin d'être luxueux, mais après des années à rêver d'indépendance et d'études à la Sorbonne, cet endroit représentait un premier pas vers sa nouvelle vie.
Elle poussa la porte de la chambre qui lui avait été attribuée et balaya la pièce du regard. L'espace était restreint, mais suffisant : deux lits simples placés de chaque côté, une armoire commune et un bureau déjà encombré de livres et de carnets. Léa s'arrêta sur ces derniers.
Elle n'était pas seule.
Un bruit de clés résonna dans l'entrée, suivi d'un claquement de porte. Léa inspira profondément et tenta de calmer la nervosité qui lui comprimait l'estomac. Elle n'avait jamais vécu en colocation. Partager son espace avec une inconnue lui semblait à la fois terrifiant et excitant.
- Toi, t'es Léa !
La voix surgit avec une telle assurance qu'elle en sursauta légèrement.
Camille Dumont venait d'entrer dans la pièce avec l'énergie d'un ouragan. Son jean déchiré, sa veste en cuir élimée et ses mèches dorées encadrant un visage lumineux lui donnaient un air à la fois rebelle et insouciant. Un large sourire insolent étirait ses lèvres alors qu'elle jetait son sac sur son lit sans la moindre cérémonie.
- Je me disais bien que j'avais entendu du bruit, ajouta-t-elle en plantant ses yeux clairs sur elle.
Léa cligna des paupières, cherchant ses mots. Camille n'avait pas l'air du tout impressionnée par la situation. Elle, en revanche, se sentait encore comme une intruse.
- J'espère que t'es pas du genre à écouter du piano à longueur de journée, hein ? Moi, je suis plutôt rock et électro, mais je mets des écouteurs, promis !
Léa ouvrit la bouche, puis la referma, prise au dépourvu. Ce n'était pas exactement la première chose à laquelle elle s'attendait.
- Je... Non, je n'écoute pas de piano, répondit-elle finalement, un peu hésitante.
Camille lui adressa un clin d'œil, visiblement satisfaite.
- Alors on va bien s'entendre.
Elle s'affala sur son lit, les bras croisés derrière la tête, l'air parfaitement à l'aise. Comme si elle était ici chez elle depuis toujours. Léa, elle, n'avait même pas encore défait ses bagages.
- Tu viens d'où ? demanda Camille en mordillant une mèche de ses cheveux.
- De Tours.
- Ah ouais, la province. T'as dû bosser comme une folle pour atterrir ici, non ?
Léa sentit une pointe de fierté l'envahir malgré elle. Oui, elle avait trimé. Pendant que d'autres vivaient leurs premières histoires d'amour et enchaînaient les soirées étudiantes, elle jonglait entre les cours et ses petits boulots pour mettre de l'argent de côté.
- J'ai toujours voulu étudier ici, admit-elle dans un souffle.
Camille la fixa un instant, puis son sourire s'élargit.
- T'as du mérite. Mais t'inquiète, je vais t'apprendre à vivre un peu en dehors des bouquins. Parce que franchement, t'as la tête de quelqu'un qui n'a jamais bu un mojito de sa vie.
Léa rougit instantanément, incapable de répondre.
Camille éclata de rire, un son franc et naturel qui résonna dans la petite pièce.
- Oh là là, je sens que cette année va être drôle. Allez, Martin, détends-toi un peu. Je te promets que d'ici quelques mois, tu ne penseras plus seulement à tes dissertations.
Léa n'en était pas si sûre. Mais en regardant Camille, elle eut le pressentiment que cette fille était sur le point de bouleverser son petit monde bien ordonné.
Elle ignorait encore à quel point.
L'ombre d'un interdit
Les jours suivants furent un tourbillon de nouveautés pour Léa. Elle découvrit le rythme effréné de la Sorbonne, les amphithéâtres imposants, les débats passionnés des étudiants en littérature et la bibliothèque labyrinthique où elle trouva rapidement refuge. Tout allait trop vite, mais elle s'accrochait.
Camille, fidèle à sa promesse, l'entraînait sans cesse hors de sa zone de confort. Elle l'avait déjà présentée à son cercle d'amis – un groupe éclectique où se côtoyaient des artistes, des philosophes et quelques âmes en quête d'identité.
- Tu dois apprendre à respirer, Martin, répétait-elle souvent en la tirant vers un café animé ou une soirée improvisée.
Léa essayait. Elle n'était pas certaine d'y parvenir, mais au moins, elle tentait.
Puis vint le premier cours de littérature du semestre. Celui qu'elle attendait avec impatience et crainte à la fois.
L'amphithéâtre était déjà plein quand elle arriva, un volume relié sous le bras. Elle trouva une place sur l'un des bancs du milieu, pas trop proche du bureau, mais suffisamment pour voir distinctement le professeur.
Quand il entra, un frisson imperceptible parcourut l'assemblée.
Gabriel Dumont.
Il n'était pas tout à fait comme elle l'avait imaginé, et pourtant, il correspondait à l'image qu'elle s'en était faite. Grand, une posture droite mais décontractée, il portait une chemise sombre retroussée aux manches et un pantalon sobre. Il ne dégageait pas cette austérité que l'on attribue souvent aux universitaires. Il avait quelque chose de plus insaisissable. Une intensité voilée.
Il posa son carnet sur le bureau et balaya la salle du regard avant de prendre la parole.
- La littérature n'est pas une discipline figée, commença-t-il d'une voix posée. Elle est vivante, elle respire, elle dérange.
Léa sentit son souffle se bloquer. Sa voix avait cette profondeur calme qui imposait l'écoute sans effort. Il ne cherchait pas à impressionner, il incarnait simplement ce qu'il disait.
Les minutes passèrent, absorbant l'attention de l'auditoire. Gabriel Dumont ne se contentait pas d'enseigner, il racontait, questionnait, provoquait la réflexion. Léa, qui avait toujours aimé la littérature, se surprit à ressentir une fascination nouvelle.
Puis son regard effleura le sien.
Un instant suspendu, à peine perceptible, mais suffisant pour envoyer un frisson désordonné le long de sa colonne vertébrale. Elle n'aurait su dire si c'était réel ou si elle l'avait imaginé.
Gabriel poursuivit son cours comme si de rien n'était.
Mais Léa, elle, n'était plus certaine de respirer normalement.
Entre les lignes
Léa referma son cahier avec précaution, comme si le moindre bruit pouvait perturber l'écho du cours qui résonnait encore dans son esprit. Autour d'elle, les étudiants se levaient en discutant, certains échangeant déjà des commentaires sur la prestation du professeur Dumont.
- Il est impressionnant, souffla une voix derrière elle.
Léa sursauta légèrement et se retourna pour voir Julien, un étudiant en philosophie qu'elle avait rencontré grâce à Camille.
- Tu ne trouves pas ? ajouta-t-il avec un sourire en coin.
Elle hocha la tête, incapable de formuler une réponse immédiate. Oui, Gabriel Dumont était impressionnant. Mais pas seulement par sa maîtrise du sujet ou par sa façon de captiver son auditoire. Il y avait autre chose, une gravité discrète, une intensité retenue qui le rendaient presque inaccessible.
Elle sentit son cœur tambouriner dans sa poitrine lorsqu'elle se leva, sa main resserrant instinctivement la lanière de son sac. Elle devait se reprendre. Ce n'était qu'un professeur, son professeur, et elle devait cesser de se laisser troubler par des détails insignifiants.
- Léa !
Elle se retourna pour voir Camille, perchée sur une table, l'air aussi insouciante que d'habitude.
- Alors, pas trop assommée par le cours de mon cher frère ?
Léa s'efforça de sourire.
- Non, au contraire. C'était passionnant.
Camille éclata de rire.
- C'est ce que tout le monde dit. Il a ce truc qui fait que même les textes les plus barbants deviennent intéressants. Enfin bref, on sort ce soir, pas d'excuses !
Léa ouvrit la bouche pour protester, mais Camille l'interrompit d'un geste.
- Non, Martin, je ne veux pas entendre que tu as un essai à rédiger ou une montagne de lectures. Ce soir, on va au moins boire un verre. Tu ne peux pas passer ta vie à travailler.
Julien acquiesça.
- Camille a raison. Et puis, ça te ferait du bien de voir autre chose que les murs de la bibliothèque.
Léa hésita. Tout en elle lui criait de refuser, de s'en tenir à son emploi du temps strict, à sa discipline. Mais une autre part, plus enfouie, plus curieuse, commençait à se réveiller.
- D'accord, céda-t-elle finalement.
Le sourire éclatant de Camille valait presque à lui seul cet effort.
- Parfait ! On se retrouve à vingt heures. Et habille-toi bien, Martin, je veux te voir autre chose qu'un pull informe.
Léa roula des yeux mais ne répondit pas.
Elle ne savait pas encore que cette soirée marquerait un tournant. Un instant de liberté volé à son quotidien structuré, mais qui, sans qu'elle le sache, la rapprocherait encore un peu plus de l'interdit.
Les premières failles
Léa n'avait jamais été du genre à passer des heures devant son miroir. Pourtant, ce soir-là, elle hésita plus que de raison sur sa tenue. Camille avait insisté pour qu'elle fasse un effort, mais elle ne voulait pas non plus donner l'impression d'en faire trop.
Après plusieurs essais infructueux, elle opta pour un simple jean noir et un chemisier bleu nuit légèrement ajusté. Sobre, mais élégant. Une touche de mascara et un rouge à lèvres discret suffirent à compléter le tout.
Quand elle rejoignit Camille dans le salon, cette dernière leva les yeux au ciel.
- On progresse, mais on peut mieux faire, lâcha-t-elle en attrapant son sac.
Léa rit doucement, plus nerveuse qu'elle ne voulait l'admettre. Elle n'était pas habituée à ce genre de soirées. Elle craignait de ne pas être à sa place, de ne pas savoir comment se comporter.
Le bar choisi par Camille était un endroit fréquenté par les étudiants de la Sorbonne. L'ambiance était feutrée mais animée, avec des rires qui fusaient par moments au-dessus de la musique en fond sonore.
Julien et Élodie étaient déjà là, accoudés au comptoir. Ils les accueillirent avec enthousiasme, et très vite, Léa se retrouva un verre à la main, embarquée dans une conversation animée sur les derniers débats philosophiques en vogue.
Elle commençait tout juste à se détendre lorsqu'une ombre attira son attention près de l'entrée.
Gabriel.
Il n'était pas seul. Un homme d'une quarantaine d'années, visiblement un collègue, échangeait quelques mots avec lui avant de s'éloigner vers une table plus discrète. Gabriel, quant à lui, s'approcha du bar, son regard balayant la pièce comme s'il évaluait la clientèle.
Léa se figea. Il était toujours dans cette même tenue sobre mais impeccable, avec une aisance naturelle qui détonnait dans l'atmosphère étudiante du lieu. Il ne semblait pas surpris de voir Camille ici, mais son regard s'attarda une fraction de seconde sur Léa.
Il y eut ce léger flottement, imperceptible pour quiconque n'y prêtait pas attention.
Puis il détourna les yeux et commanda un verre.
Léa se força à respirer normalement. Il n'y avait aucune raison pour qu'elle réagisse ainsi. Ce n'était qu'une coïncidence. Il était son professeur, le frère de sa colocataire, rien de plus.
Mais alors pourquoi ce simple échange de regards lui donnait-il l'impression d'avoir franchi une frontière invisible ?
- Tu vas bien ? murmura Camille en remarquant son trouble.
Léa hocha la tête rapidement.
- Oui, tout va bien.
Elle plongea dans la conversation, s'efforçant d'ignorer le poids de cette présence derrière elle. Mais au fond d'elle, elle savait que quelque chose venait de changer.
Elle n'était plus sûre de vouloir lutter contre cette attirance interdite.
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09/03/2025
Chapitre 2 02
09/03/2025
Chapitre 3 03
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Chapitre 5 05
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Chapitre 6 06
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Chapitre 7 07
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Chapitre 8 08
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Chapitre 9 09
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Chapitre 10 10
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Chapitre 11 11
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Chapitre 18 18
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Chapitre 19 19
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Chapitre 20 20
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Chapitre 21 21
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Chapitre 22 22
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Chapitre 23 23
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Chapitre 24 Fin
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Chapitre 25 Épilogue
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