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Les vacances d’été pouvaient enfin commencer. Après une année plus que chaotique, entre examens finaux, divorce de mes parents et déception amoureuse, je ne pouvais qu’être heureuse d’y arriver enfin.
J’entamais, pour la dernière fois, la route de mon lycée jusque chez moi. Comme pour toute dernière fois, je contemplais un peu plus le paysage. Je prêtais attention aux détails qui m’entouraient. Par exemple, je n’avais jamais remarqué qu’il y avait des graffitis sur les murs de cette ruelle où je passais à l’instant. J’étais toujours tellement absorbée par mes études, ou par mes problèmes personnels, que je n’avais jamais profité réellement de mon trajet. Maintenant que c’était la dernière fois, j’étais partagée entre la nostalgie et le soulagement. Cette année n’aura pas été de tout repos mais je m’en étais plutôt bien sortie finalement. Ce qui avait été le plus difficile ? Ma rupture avec Travis. Le divorce de mes parents, je m’y attendais. Après des années à se tirer dans les pattes, c’était même un soulagement de les voir se séparer. Je suis restée vivre avec ma mère, à San Diego. Je ne me sentais pas de déménager d’ici ou d’aller chez mon père une semaine sur deux. De toute façon, c’était une évidence de rester avec elle. Je me suis toujours mieux entendue avec ma mère qu’avec mon père. Je les aime tous les deux, mais c’est une question d’affinité. Mon père était la plupart du temps en voyage d’affaires, je ne le voyais pas très souvent. C’était d’ailleurs le cas depuis quelques semaines maintenant.
J’arrivais face à chez moi. La peinture de la porte d’entrée était encore fraîche. Maman s’était mise en tête de repeindre intérieur et extérieur, à l’arrivée du beau temps. Je sortais mes clés de ma poche, et les introduisais délicatement dans le verrou de la porte, en prenant soin de ne pas abîmer la peinture. J’entrais dans une maison recouverte presque entièrement de plastique. Nous les enlevions uniquement quand nous avions besoin de ce qui s’y trouvait en dessous, comme le canapé et la télévision par exemple.
— Maman ! C’est moi, je suis rentrée, criais-je assez fort pour qu’elle m’entende, tout en posant mon sac à dos sur le plan de travail de la cuisine.
— J’arrive, Stella, je suis à l’étage, je me change.
Deux minutes plus tard, je l’entendais descendre les marches en courant.
— Alors ? Tu as récupéré tes affaires ? me demandait-elle en se dirigeant vers la machine à café de la cuisine.
Je m’installais sur un tabouret en face du plan de travail.
— Oui, plus rien de ce qui m’appartient est dans ce lycée, c’est terminé, répondais-je.
— Place aux vacances, ma chérie, tu les as bien méritées. Presque trois mois pour faire tout ce que tu souhaites, avant de partir pour l’université.
Ma mère se faisait un café en me tournant le dos, j’entendais sa voix changer et devenir tremblante en évoquant l’université. Elle allait se retrouver seule, ça la chagrinait sans doute un peu. Je reviendrais durant les vacances scolaires, c’était évident.
— Je compte bien en profiter, disais-je en m’imaginant sur le bord de la plage, un cocktail à la main.
Je vivais en bord de mer, ce qui était avantageux l’été, je n’avais pas besoin d’aller bien loin pour profiter des vacances. Ce soir, une des classes de dernière année de mon lycée organisait une soirée sur la plage. Un mélange entre soirée d’étudiant et de feu de camp. Il y aura un grand feu, on est sensé y amener des choses que nous voulons oublier de nos années lycée, histoire de les faire brûler à tout jamais. Ces derniers temps, j’avais tout fait pour ne pas traîner dans les soirées afin de ne pas croiser Travis, mais ce concept me plaisait bien. J’étais bien déterminée à profiter de chaque seconde de ce dernier été ici. J’y allais avec Monica, ma meilleure amie, et des amis de notre classe que nous rejoindrons une fois sur place.
Ma mère venait s’asseoir sur le tabouret à côté du mien, elle enveloppait de ses deux mains son mug à café, et le buvait lentement, pour ne pas se brûler.
— Je suis de sortie ce soir. Je vais à une soirée sur la plage de Connut Vallée. Il y a une petite fête pour les étudiants diplômés, disais-je à ma mère en tapotant en même temps sur mon portable.
— Oh ! C’est bien ça, tu vas pouvoir relâcher la pression des examens, répondait-elle, sans doute plus enthousiaste que moi.
— On doit apporter quelque chose à faire brûler, quelque chose que nous voulons oublier de cette année. Je ne sais pas trop quoi prendre, je t’avoue.
— Moi, je sais ! répondait-elle en souriant.
Immédiatement, ma mère posait sa tasse sur le plan de travail et partait à l’étage.
— Maman ! Où tu vas ?
Je restais sur mon tabouret sans vraiment comprendre ce qu’il se passait, je l’entendais redescendre quelques secondes plus tard.