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À l'ombre d'un doute

À l'ombre d'un doute

SAPHIR

5.0
avis
801
Vues
40
Chapitres

Il est fait pour la lumiĂšre, elle est adepte des tĂ©nĂšbres. Leur histoire aurait pu s'arrĂȘter lĂ . Pourtant, elle devient trĂšs vite son yin, et lui, son yang. Malheureusement pour eux, les ombres menaçantes du passĂ© rĂŽdent..

Chapitre 1 Chapitre 01

PROLOGUE :

Cel : A ce soir bébé

Moi : Ă  ce soir, puce

Cel : tu passeras me chercher ou pas ?

Moi : vaut mieux pas, je veux dire que je ne sais exactement Ă  quelle heure je finirais.

Cel : ok

Moi : voilà, tu passeras me laisser la clé de la maison au service

Cel : ok, dit-elle tristement

Je m'avance vers elle et lui fait la bise, elle veut mettre ses bras autour de mon cou mais j'esquive et sors rapidement de la maison. Je me dirige à grands pas vers la voiture que je débloque et entre avant d'amorcer la marche arriÚre.

Le trajet de la maison jusqu'au boulot s'est fait sans encombre mĂȘme si j'avoue que je me suis fait quelques petites frayeurs en prenant la route qui passe devant la facultĂ© des lettres. Je suis un peu pensif, je ne sais vraiment quoi penser de la relation que j'entretiens avec Celanie depuis prĂšs de deux ans.

Nous nous sommes rencontrés lors d'une de ces fameuses journées porte-ouvertes que donne trÚs souvent la faculté de Médecine. Elle paraissait perdue au milieu de tous ses congénÚres, elle avait l'air d'un animal blessé ; elle était tantÎt exubérante, tantÎt silencieuse et affichait un sourire de circonstance. Dans ses yeux, l'on pouvait lire toute la tristesse et la peine du monde.

Je ne sais pourquoi mais je fus tenté de l'aborder, j'avais envie de voir le sourire sur son visage, j'avais envie de la voir s'animer ; malgré son sourire feint, j'eus envie de l''entendre rire. Est-ce ma propension à ressentir la détresse et la douleur chez l'autre ? Est-ce sa beauté ? Je ne saurais vraiment dire mais je ressentais le besoin de m'approcher d'elle et lui venir en aide.

***Presque deux ans auparavant****

Moi : Bonjour mademoiselle

« Bonjour monsieur »

Moi : j'espÚre ne pas vous déranger

« Euh...dit-elle en me dévisageant »

Moi : si je vous dérange, je peux vous laisser tranquille.

« Oh non, non » dit-elle en me faisant un sourire encourageant.

Moi : je vous observe depuis un moment et j'ai l'impression que vous ĂȘtes perdu, vous paraissez vraiment triste j'avais envie de vous Ă©gailler un tout petit peu.

Cel : oh !

Moi : je suis Angel, enchanté !

Cel : moi de mĂȘme, Celanie.

Moi : trÚs beau prénom et il vous va bien.

Cel : merci

Moi : que faites-vous ici ?

Cel : je suis en PremiÚre année en fac de médecine, il nous a été demandé de venir. Certains parmi nous, ont vu là une formidable occasion d'approcher les cadres de l'hÎpital et l'opportunité de rencontrer d'autres personnalités.

Moi : je vois

Cel : et vous ?

Moi : je passais lorsque je vous ai aperçu

Cel : ah, ok. Que faites-vous dans la vie ?

Moi : ah oui, oui, j'ai carrément fais l'impasse c'est vrai. Je suis aide-soignant dans cet hÎpital.

Cel : ah bon ?

Moi : mais oui

Cel : eh ben..

Moi : je peux vous le redire si je suis sure que vous me gratifierez Ă  chaque fois d'un sourire aussi lumineux.

Cel : hi hi hi, juste que cela fait du bien de rencontrer une personne du corps médical.

Moi : je ne suis pas un illustre personnage mais juste un aide-soignant.

Cel : vous en parlez comme si vous Ă©tiez un personnage insignifiant alors que vous ĂȘtes aussi un maillon important de la chaine.

Moi : merci, si vous le dites.

Cel : et je le pense !

Moi : pourquoi ce sourire triste ?

Cel : pardon ?

Moi : je ne sais pas ce que vous avez ou ce qui vous met dans cet Ă©tat mais vous perdez beaucoup en Ă©clat.

Cel : oh !

Moi : peut-on se tutoyer ?

Cel : ou, bien sure.

Moi : de quel pays es-tu originaire ?

Cel : du Cameroun

Moi : une compatriote !

Cel : oh !

Moi : mais oui, je suis vraiment content d'ĂȘtre sorti de mon lit ce matin.

Cel : ha ha ha ha ha

Moi : j'aime ce sourire, tu es trĂšs belle.

Cel : je préfÚre le dire, je sors à peine d'une relation ; j'en suis encore ébranlée.

Moi : humm, ceci explique cela.

Cel : je ne peux rien envisager avec quiconque pour le moment.

Moi : ceci a le mĂ©rite d'ĂȘtre clair.

Cel : voilĂ .

Moi : alors Beti ?

Cel : mais oui et toi ?

Moi : aussi

Cel : alors depuis combien de temps es-tu en France ?

Moi : j'y suis depuis 8 ans aujourd'hui

Cel : tu travailles depuis combien de temps ?

Moi : deux ans et toi ?

Cel : je suis née ici et j'ai toujours vécu ici.

Moi : ok

Cel : euh..

Moi : oui

Cel : tu as quel ùge ? Tu n'es pas obligé d'y répondre.

Moi : j'ai 28 ans et toi ?

Cel : 20 ans

Moi : ok

C'est ainsi que Celanie et moi, avions commencĂ© Ă  converser et par la mĂȘme occasion Ă  tisser une relation qui s'est dĂ©veloppĂ©e avec le temps. Ladite relation fut d'abord celle de deux amis, avant de passer par la case complices et aboutir Ă  celle d'amants.

J'ai appris à la connaitre au fur et à mesure, je ne regrette en rien mon choix. Elle n'est certes pas miss Monde mais j'aime bien sa vivacité d'esprit, sa pugnacité et la naïveté dont elle fait relativement preuve.

Tout allait bien jusqu'Ă  ce qu'ils fassent leur entrĂ©e dans nos vies, c'est dans ces moments lĂ  que je me dis que le don de voyance peut ĂȘtre utile. Si seulement c'Ă©tait le seul Ă©lĂ©ment perturbateur, « elle » s'entĂȘtait Ă  vouloir me mettre cette idĂ©e dans la tĂȘte ; ceux qui la connaissent savent qu'elle peut parfois ĂȘtre une adversaire redoutable.

Si seulement j'avais pris une autre décision, si seulement je pouvais me détacher de « cet amour »,si je ...si je...mais avec des si, on mettrait Paris en bouteille.

Partie 1 : Dans le bain...

Moi : monsieur Dupont, comment vous sentez-vous aujourd'hui ?

Dup : ça peut aller mais j'ai des rhumatismes.

Moi : comment avez-vous passé la nuit ?

Dup : bien et vous ?

Moi : ça peut aller

Je fais le tour du service avec le docteur et l'équipe de nuit, je prends connaissance des rapports de nuit, les incidents qui ont pu avoir lieu et des différents paramÚtres inhérents à la santé de chaque malade. Une petite réunion a lieu dans le bureau de l'infirmier-cadre en compagnie des autres internes puis, la journée peut enfin commencer.

Les heures s'égrainent, se suivent mais ne se ressemblent pas ; il y a toujours un imprévu, toujours une montée d'adrénaline due à l'arrivée de nouveaux patients, des urgences. Dans mon métier nous sanctifions et bénissons la dimension humaine, la tolérance, la patience et l'amour de l'autre sont cultivées.

« Bonjour monsieur »

Moi : oui mademoiselle, en quoi puis-je vous aider ?

« Suis-je bien au service pédiatrique ? »

Moi : non, plutĂŽt au service GĂ©riatrique.

« Pardon ? »

Moi : La gériatrie étant la médecine des personnes ùgées.

« Ah oui, je vois. »

Moi : Voilà, prenez l'ascenseur B puis la sortie A et vous vous retrouverez sous le préau.

« Merci »

Moi : attendez, vous ĂȘtes Ă  pieds ?

« Non en voiture »

Moi : vous contournez puis descendez jusqu'au rond point et prenez Ă  votre gauche, vous allez Ă  l'hĂŽpital mĂšre-enfant.

« Merci, monsieur »

Moi : je vous en prie

Je rejoins la salle de restauration ou je retrouve mes collÚgues avec qui je discute aprÚs avoir travaillé pendant 4 heures non stop. Je suis exténué, on a beau croire que l'on est vacciné, que la couverture, la cuirasse que l'on s'est forgée est imperméable, mais non. L'on croit pouvoir maitriser ses émotions face à la misÚre, la déchéance humaine, mais ce n'est qu'illusion.

Ce matin, j'ai du voir un homme souffrant de pleurésie s'éteindre à petits feux. Cet homme de 74 ans a expiré devant mes yeux et ceux de sa fille venue lui rendre visite. Nous, le corps médical avons pour habitude d'activer un pare-feu psychologique pendant ce long et douloureux processus.

J'ai du puiser dans mes réserves afin d'emmener la fille du défunt à comprendre, réaliser et permettre que le corps de son pÚre soit emmené à la morgue. Comment rester impassible devant la détresse de sa fille ? Comment rester impassible devant la douleur et la fragilité de sa fille ? Je n'ai jusqu'ici pas trouvé une réponse adéquate, une réponse que je puisse adapter et servir à tous les proches des malades.

Je suis d'ailleurs resté coi devant la jeune fille qui avait les yeux pleins de larmes, les mains qui tremblaient et le menton qui montait et redescendait approximativement toutes les deux minutes, signe d'une certaine fragilité émotionnelle ; elle s'est tournée vers moi avec des yeux de biche.

« Comment faites-vous ? Nous savions depuis un moment qu'il pouvait trépasser, nous nous sommes préparés psychologiquement du mieux que nous le pouvions mais c'est toujours aussi difficile. »

Moi : je vous comprends, on n'est jamais prĂȘt Ă  voir un de nos proches s'en aller.

« Comment faites-vous pour rester aussi détaché ? Comment faites-vous pour paraitre aussi professionnel ? Comment faites-vous pour accepter que la dame faucheuse se promÚne aussi facilement en se vantant dans cet hÎpital ? Pour quoi acceptez-vous qu'elle se pavane telle une reine dans les couloirs de votre service ? »

Moi : on n'accepte pas, on ne se rĂ©sout jamais Ă  laisser partir un ĂȘtre qui nous soit cher ou pas. Pour en revenir Ă  votre question, tout rĂ©side dans le paraitre et aprĂšs l'on fait un travail sur soi Ă  la fin de chaque journĂ©e ; gĂ©nĂ©ralement en sortant de l'hĂŽpital, on redevient un homme x ou y, l'aide-soignant ou le personnel hospitalier s'arrĂȘte dĂšs qu'on franchit le seuil de cet hĂŽpital.

« Les images ? »

Moi : Nous en sommes hantĂ©s pendant quelques jours, on prend le soin de compartimenter ; on met dans un tiroir dans un coin de notre tĂȘte que l'on prend soin de ne jamais ouvrir. Je vous souhaite du courage, vous devez vous rendre Ă  l'accueil afin de vous occuper de la paperasse.

« Merci, encore. »

Moi : de rien et bonne journée.

1 heure plus tard, je sors de l'hĂŽpital en faisant une petite priĂšre. Je prends la voiture et au moment oĂč je mets la clĂ© de contact, mon tĂ©lĂ©phone vibre ; j'esquisse un sourire puis dĂ©croche.

Moi : oui, bébé

Cel : as-tu terminé ?

Moi : oui, Ă  peine.

Cel : ok, comment a été la journée ?

Moi : exténuante

Cel : Oh, je vois mon bébé, tu rentres et je vais te masser.

Moi : merci amour, c'est l'une des raisons pour laquelle, tu es irremplaçable.

Cel : trĂšs drĂŽle

Moi : et ta journée ?

Cel : les cours en plus de la pratique, je suis fatiguée mais j'ai pu me reposer.

Moi : ok

Cel : je t'envoie la liste de tout ce qu'il faut par sms ?

Moi : oui, bien sure.

Cel : désolée de te faire travailler alors que tu sors à peine du boulot.

Moi : ce n'est pas grave.

Cel : Ă  tout Ă  l'heure et courage.

Une heure plus tard, je gare devant la maison, je bloque les portiĂšres et rentre dans l'immeuble tout confiant. Celanie et moi, passons le plus clair de notre temps dans l'appartement de l'un ou l'autre. Je ne pensais pas m'attacher aussi vite Ă  Celanie, mais que puis-je donc y faire ?

Je rentre dans l'appartement en faisant le moins de bruit possible, Celanie est dans un coin de mon séjour entrain de réviser. Je vais déposer les courses que je range assez vite dans la cuisine et vais lui faire un bisou auquel, elle répond machinalement.

Moi : ca va ?

Cel : oui et toi ?

Moi : ca peut aller.

Cel : j'ai cuisiné

Moi : ah bon ? Dis-je en en salivant d'avance

Cel : mais oui, tout est Ă  la cuisine

Moi : ok

Je cours, que dis-je ? Je vole, je rentre dans la cuisine et ouvre rapidement les marmites. Dans la premiĂšre, je trouve des frites de plantains ou ce qu'ils sont sensĂ©s ĂȘtre. Dans la deuxiĂšme marmite, je vois du cassoulet, cette espĂšce de sauce avec haricots et saucisses au gout bizarre que l'on retrouve dans tous les magasins.

Je referme la marmite tout dépité, l'envie que j'avais à m'assoir devant la télévision à déguster un bon plat venait juste de s'envoler. Je m'accoude sur le plan de travail et je ressens une douleur fugace au coude. Je me retourne et constate que ce n'est ni plus ni moins que l'outil préféré de cuisine de Célanie : l'ouvre-boite.

Je vais prendre une douche rapide et reviens m'assoir au salon, je mets la télévision et regarde sans voir, l'esprit ailleurs.

Cel : c'est quoi ce regard ?

Moi : pardon ?

Cel : tu parais embĂȘtĂ©

Moi : c'est rien

Cel : as-tu mangé ?

Moi : je n'ai pas faim

Cel : tu n'as pas mangé de la journée, m'as-tu dit.

Moi : ah oui ?

Cel : c'est quoi cette réponse sibylline ?

Moi : je n'ai pas faim

Cel : mais c'est bon, tu peux manger, attends je vais te servir

Moi : non, Célanie ça peut aller.

Je ne sais combien de fois j'ai du la rappeler à l'ordre pour lui faire comprendre que je suis allergique à tout ce qui est boite, j'en ai horreur. J'ai été élevé à la nourriture de maman, ma mÚre nous a toujours fait de bons petits plats à base de produits frais ; j'ai du apprendre à faire la cuisine et j'ai toujours pensé que j'aurais la chance de tomber sur une femme qui pourrait me mitonner de bons petits plats.

Cel : attends, je vais te faire une omelette

Elle n'attend aucune réponse de ma part et s'en va en cuisine pour revenir 10 mn plus tard avec un plateau-repas qu'elle dépose devant moi un sourire aux lÚvres. Je le prends aprÚs avoir remercié et y goutte, l'omelette est caoutchouteuse, je m'efforce à avaler chaque bouchée pour lui faire plaisir, c'est immonde. Je me rattrape sur les frites de plantains et arrose le tout d'un jus d'orange.

Cel : alors ?

Moi : c'Ă©tait bon

Cel : merci mon bébé

Je me lÚve aprÚs quelques minutes et vais prendre les clés de voiture, j'ai besoin de sortir et m'oxygéner l'esprit. Je fais un tour rapide au kébab du coin, je mange un bout rentre rapidement à la maison. Celanie n'est plus entrain d'étudier mais plutÎt dans la douche, je me couche et quelques minutes plus tard, je n'entends plus l'eau couler et la porte de la salle de bain s'ouvre.

Je suis rĂ©veillĂ© par CĂ©lanie qui a besoin d'un cĂąlin, quinze minutes plus tard, la tache acquittĂ©e je peux enfin m'endormir. J'ai juste envie de m'endormir, j'ai juste envie de me barrer d'ici. Celanie aprĂšs un tour dans la salle de bain, vient se coller Ă  moi et pose sa tĂȘte sur mon torse.

Cel : je t'aime Angel.

Moi :....

***QUELQUES HEURES PLUS TARD****

Il est 6 heures du matin, je suis sous la douche lorsque des coups légers sont frappés sur la porte de la salle de bain.

Moi : entrez !

Cel : chéri, c'est pour toi dit-elle en me tendant le portable.

Je me sĂšche rapidement puis prends pendant qu'elle sort et referme bien derriĂšre elle.

Moi : oui allo

« Tu y as pensé ? »

Moi :...

« Angel ? »

Moi : oui

« Alors ? »

Moi : ce n'est pas une bonne idée, tu sais.

« Qu'est ce qui t'empĂȘche d'essayer ? »

Moi : .....

« Je suis mieux placée pour savoir comment te rendre heureux. »

Moi : non

« Ok, laissons tomber, quand passeras-tu me voir ? »

Moi : je ne sais pas, il me faut programmer tout ça.

« Ok, mais ne tarde pas ; arrange toi Ă  ĂȘtre lĂ  dans trois mois sinon, j'aviserais. »

Moi : pourquoi es-tu si précise ?

« Tu verras... »

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