Un an
a
rideau bleu de ma chambre. Le soleil vien
rd ! midi, une heure de
e tout, lentement tout revient ; la nuit de l'école, hier, Mathilde, Clémence et Anaïs, retrouvées et disparues,
pouvoir le caresser et le câliner ! Mais c'est trop tôt, bien tro
pensées se promener. Pour l'instant, lovée sous ma couette, dans ma chambre,
s bruits semblent venir d'en bas, là où il y a la grande cuisine, la salle à manger et le très grand salon qui ouvre sur le jardin. Les bruits augmentent, c'e
moindre prétexte. Pour un regard de travers, une injonction de voix mal placée, il devient comme fou de rage, le visage congestionné, les yeux
ondrer dans ma poitrine, je me sens
e lever, je n'ai aucune envie de croiser mon père et d'attirer sa fureur sur moi. Et puis je pense que c'est peut-être est-ce déjà à cause de moi qu'il a éclaté ainsi, parce qu'il est midi et que je ne suis pas encore levée.
livres de classe, sur lesquels j'ai travaillé des heures et des heures pour réussir mes études. Il y a un grand lit et une armoire à glace et puis un petit secrétaire qui fait également penderie. Et c'est tout. Toute ma vie tient entre ces quatre murs tapissés de fleurettes bleues, et ces trois meubles. Le secrétaire est tout petit et je m'étonne
manger. C'est comme cela depuis q
envie que cela change – vraiment. C'était comme une rage immense qui montait en moi, il fallait vraiment que je change, que je me transforme complètement. Tout a défilé devant mes yeux : les femmes trop grosses de ma famille, les interminables repas de fa
déjà perdu 12 kg, je ne pesais plus que 42 kg ; quand l'été qui a suivi nous sommes en famille partis en vacances en Espagne, je paraissais si maigre dans mes petites robes à bretelles que mon frère disait que je sortais d'un camp de concentration. Mais je m'en foutais et puis mon frère parle toujours pour dire des méchancetés, et puis ce n'était pas vrai, je n'étais pas si décharnée. Je ne suis jamais descendue en dessous de 42 kg,
ère, qui ne travaille pas, passe beaucoup de temps à cuisiner. Les repas sont des moments importants, où toute la famille se retrouve
ait au goûter. Et j'en ai mangé des repas roboratifs, viandes en sauce, gratins de légumes, purées et pâtes, toujours servis abondamment en grosses proportions sur la table familiale. Mais aujourd'hui, je déteste ce déluge de nourritur
nde, de toute façon je n'en aime pas le goût. Ce régime ultra léger me va bien, je me sens bien. Souvent, mon petit déjeuner se limite à une minuscule tar
air de manger de tout (je ne saute jamais aucun repas et je mange toujours de quelque chose qui est présenté à table). Mais je trie tout
t, et qui traîne en longueur. Ma mère fait un effort pour cuisiner un repas agréable et qui présente bien, mais moi, je m'en fiche, je n'aime pas ces rep
truire le sens et l'intention joyeuse des quelques mots que nous venions naïvement de prononcer. Le procédé se répète à chaque repas. C'est d'une violence inouïe. Face à cela, il y a deux méthodes : la mienne, qui consiste à subir et se taire en attendant de pouvoir quitter la table, et celle de ma sœur, qui tient tête à
lument jamais, aucune aide, aucun secours, auprès de nos parents. Notre frère aîné comme tous les faibles, tape sur les plus faibles que lui. Quant au père, il est inimaginable qu'il s'intéresse une seule fois dans sa vie aux discussions des enfants, et qua
e ce monde moche et moi en arrêtant de manger. Ne plus manger me met dans une bulle, élo
x de mes maîtresses, puis dans ceux de mes professeurs cette lueur d'estime et d'appréciation, ce remerciement dans leur voix, cette satisfaction de trouver un écho dans un de leurs élèves, une récompense pour leur travail éducatif. J'ai grandi avec l'approbation manifeste de tous mes éducateurs. Et cela s'est tr
trop. Née trop tôt après mon frère et ma sœur, et puis deux filles, ça fait deux de trop. Les filles n'ont pa
cela pour mes camarades de concours, ceux qui avaient partagé la même classe préparatoire que moi, et qui ont réussi. Ces concours sont si difficiles, et ces écoles sont si prestigieuses, que lorsqu'on les réussit,
as content de ma réussite spectaculaire comme le sont les autres parents, il ne trouvait qu'à râler. Je l'ai maudit à ce moment-là, je n'ai même pas pleuré, je l'ai maudit, j'avais la colère froide et envie de me venger. À ce moment, j'ai pris conscience de ma valeur, et je me suis dit que je ne me laisserais pas fai
: je suis de trop et il n'y a jamais de temps ou d'argent pour moi ; jamais de temps pour faire réciter mes leçons
rs il est absolument indispensable pour elle que les enfants montrent une bonne éducation, qu'ils soient bien coiffés, bien habillés. Je n'ai donc manqué de rien, en façade, même si je n'avais droit qu'à une j
cause de mes vêtements de garçon (de mes frères) et de mes cheveux courts. Ils m'ont chassé de leurs jeux et je suis rentrée à la maison le cœur gros et lourd. J'en ai
je n'aime pas du tout mon frère – heureusement il étudie en province, je ne le vois que certains weekends – et ma sœur m'agace, de toute façon elle a une chambre à Paris pour ses études
ses boucles blondes, ses yeux bleus, regarder son sourire et rire avec lui. Je suis seule dans cette petite chambre bleue, dans cette
ends dans ma poche le rasoir jetable que j'ai pris discrètement à la salle de bains. En le tordant, je le casse et détache la lame de son support en plastique et je la regarde, fascinée. Cette si petite lame en métal brillant, si fine, si coupante. Comme il serait facile de s'en
j'ai connu, ce sont les coups et la douleur. J'ai mal. J'ai tout le temps mal. J'ai mal à l'intérieur. J'ai le cœur qui saig
rle, aïe, ça pique, ça me fait monter les larmes aux yeux. Mais ce n'est rien du tout par rapport à ce que je ressens à l'intérieur. Alors ce n'est pas grave. Alors je continue, quatre, cinq si
me ces coupures à vif qui réagissent au moindre mouvement d'air. J'approche la lame de rasoir de l'intérieur de mes cuisses, là où la peau est si fine, si douce. Et Je taille. Jusqu'à ce qu'apparaissent des l