Au son familier de la machine à café, je me suis réveillée, l' odeur du grain fraîchement moulu emplissant notre appartement parisien. Mais cette fois, l' arôme qui jadis me réconfortait, me soulevait le cœur. Mes yeux se sont ouverts sur la même chambre, le même lit, la même vie que celle que je pensais avoir quittée pour toujours. Le souvenir de ma mort était encore glaçant, l' expulsion, la trahison, le dénuement après avoir tout perdu, juste avant de fermer les yeux une dernière fois. Et puis, ce réveil inattendu. Mes mains, lisses et jeunes, n' étaient plus celles usées par mon passé, confirmant l' incroyable réalité : j' étais revenue. Marc, mon mari, entra, son sourire charmeur dissimulant l' avocat ambitieux qui avait bâti sa carrière sur mes ruines. Sa voix, autrefois si douce, était maintenant un vide assourdissant. Il déposa un baiser sur mon front, et son contact me brûla la peau. « J'ai une petite chose à te demander », a-t-il commencé, avec ce ton faussement léger que je connaissais si bien. Il allait me parler de Sophie Moreau, ma meilleure amie, l' artiste montante qui m' avait dérobé mes idées, mon travail et mon mari. Dans ma vie passée, j' avais supplié qu' elle ne s' installe pas chez nous, mais ma faiblesse n' avait fait que renforcer leur détermination. Cette fois, mon silence le décontenança lorsqu' il proposa d' héberger Sophie, victime d' un "propriétaire salaud". Son regard, mélange de supplication et d' ordre, attendait mes larmes, une scène. Pourtant, ma réponse fut neutre, détachée : « D'accord. » Il cilla, visiblement surpris : « D'accord ? C'est... c'est tout ? » « Oui, d'accord. C'est ma meilleure amie. Si elle a des ennuis, c'est normal de l'aider. » Un immense soulagement envahit son visage, vite remplacé par un air suffisant ; il pensait m' avoir eue. Il pensait que ma docilité était amour inconditionnel. Il ne voyait pas que ma douleur s' était transformée en braise ardente, en froide détermination. Cette fois, je ne combattrai pas ouvertement, je ne crierai pas, je ne pleurerai pas. Je leur donnerai tout ce qu'ils désirent, sur un plateau d'argent. Puis, je les regarderai s' élever, se gaver de leur succès mal acquis, attendant patiemment qu' ils s' autodétruisent. La corde pour se pendre, je la leur fournirais moi-même, avec un sourire. « Parfait, alors », a repris Marc, déjà ailleurs, tout à ses transactions. Je l'ai vu sortir, ravi de son triomphe. Deux ans. C'était largement suffisant. Je me suis approchée du calendrier : nous étions exactement deux ans avant ma mort. Un sourire se dessina sur mes lèvres. Un vrai sourire, cette fois. Le jeu venait de commencer. Et cette fois, c'est moi qui fixais les règles.
Au son familier de la machine à café, je me suis réveillée, l' odeur du grain fraîchement moulu emplissant notre appartement parisien.
Mais cette fois, l' arôme qui jadis me réconfortait, me soulevait le cœur.
Mes yeux se sont ouverts sur la même chambre, le même lit, la même vie que celle que je pensais avoir quittée pour toujours.
Le souvenir de ma mort était encore glaçant, l' expulsion, la trahison, le dénuement après avoir tout perdu, juste avant de fermer les yeux une dernière fois.
Et puis, ce réveil inattendu.
Mes mains, lisses et jeunes, n' étaient plus celles usées par mon passé, confirmant l' incroyable réalité : j' étais revenue.
Marc, mon mari, entra, son sourire charmeur dissimulant l' avocat ambitieux qui avait bâti sa carrière sur mes ruines.
Sa voix, autrefois si douce, était maintenant un vide assourdissant.
Il déposa un baiser sur mon front, et son contact me brûla la peau.
« J\'ai une petite chose à te demander », a-t-il commencé, avec ce ton faussement léger que je connaissais si bien.
Il allait me parler de Sophie Moreau, ma meilleure amie, l' artiste montante qui m' avait dérobé mes idées, mon travail et mon mari.
Dans ma vie passée, j' avais supplié qu' elle ne s' installe pas chez nous, mais ma faiblesse n' avait fait que renforcer leur détermination.
Cette fois, mon silence le décontenança lorsqu' il proposa d' héberger Sophie, victime d' un \"propriétaire salaud\".
Son regard, mélange de supplication et d' ordre, attendait mes larmes, une scène.
Pourtant, ma réponse fut neutre, détachée : « D\'accord. »
Il cilla, visiblement surpris : « D\'accord ? C\'est... c\'est tout ? »
« Oui, d\'accord. C\'est ma meilleure amie. Si elle a des ennuis, c\'est normal de l\'aider. »
Un immense soulagement envahit son visage, vite remplacé par un air suffisant ; il pensait m' avoir eue. Il pensait que ma docilité était amour inconditionnel.
Il ne voyait pas que ma douleur s' était transformée en braise ardente, en froide détermination.
Cette fois, je ne combattrai pas ouvertement, je ne crierai pas, je ne pleurerai pas.
Je leur donnerai tout ce qu\'ils désirent, sur un plateau d\'argent.
Puis, je les regarderai s' élever, se gaver de leur succès mal acquis, attendant patiemment qu' ils s' autodétruisent. La corde pour se pendre, je la leur fournirais moi-même, avec un sourire.
« Parfait, alors », a repris Marc, déjà ailleurs, tout à ses transactions.
Je l\'ai vu sortir, ravi de son triomphe.
Deux ans. C\'était largement suffisant.
Je me suis approchée du calendrier : nous étions exactement deux ans avant ma mort.
Un sourire se dessina sur mes lèvres. Un vrai sourire, cette fois.
Le jeu venait de commencer. Et cette fois, c\'est moi qui fixais les règles.
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