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Une vengeance démesuré

Une vengeance démesuré

RĂȘverie

5.0
avis
23
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5
Chapitres

Laurent, un homme charismatique mais hantĂ© par son passĂ©, se retrouve pris dans un tourbillon de mensonges, de dĂ©sirs inavouĂ©s et de vengeance. Alors qu'il tente de reconstruire sa vie avec Nadine, une femme dont les ambitions dĂ©passent ses scrupules, Laurent dĂ©couvre que les apparences sont souvent trompeuses et que mĂȘme les alliances les plus solides peuvent se rĂ©vĂ©ler fragiles. Il devra alors choisir entre le chemin de la rĂ©demption et celui de la destruction.

Chapitre 1 Chapitre 1

Le dos lĂ©gĂšrement voĂ»tĂ©, Davis, avec ses mains rugueuses de vieil homme, tenait prĂ©cautionneusement le skateboard tout en fixant la grande fenĂȘtre de son petit atelier. L'endroit, baignĂ© par la lumiĂšre d'un soleil estival, semblait ĂȘtre un dĂ©sordre organisĂ© qui plaisait Ă  ce vieux bricoleur. L'atelier abritait un Ă©tabli mal ajustĂ©, un escabeau en bois vermoulu Ă  l'aspect dangereux, et des Ă©tagĂšres en sapin fixĂ©es de travers.

Sur l'Ă©tabli, un fouillis d'outils - scies, serpes, couteaux, lames, ciseaux Ă  bois, papiers de verre -, ainsi que mille autres petites choses de menuisier, Ă©taient Ă©parpillĂ©s. Une grande table en inox, appuyĂ©e contre un mur, Ă©tait encombrĂ©e de potentiomĂštres, transducteurs, transformateurs, capteurs, et hydrophones, tous assoupis sous la chaleur. PrĂšs de la fenĂȘtre, un tĂ©lescope d'excellente qualitĂ© observait le ciel, tandis que des bobines de fils de cuivre et des cĂąbles multicolores jonchaient le sol. Un vieil ordinateur, aussi ancien que Davis lui-mĂȘme, trĂŽnait sur un bureau d'angle, et un tableau couvert de formules chimiques ornait un des murs.

Davis, un homme ĂągĂ© Ă  la chevelure grisonnante et Ă©parse, portait toujours une grande blouse bleue, la mĂȘme teinte que le ciel. Ce jour-lĂ , Ă  cause de la chaleur, elle Ă©tait ouverte, et le bas flottait lĂ©gĂšrement dans l'air poussiĂ©reux de l'atelier. L'homme posa doucement le skateboard sur un coin de l'Ă©tabli, jetant un long regard sur cet objet qui Ă©tait devenu son obsession. Il en Ă©tait convaincu, son invention allait fonctionner. Des annĂ©es de rĂ©flexion, des mois de calculs, de mesures et de soudure s'Ă©taient Ă©coulĂ©s. Aujourd'hui, c'Ă©tait le grand jour; il devait convaincre Sylvia, lui faire comprendre, l'initier Ă  son projet. Un sourire s'Ă©panouit sur son visage alors qu'il apercevait sa fille arriver Ă  travers la vitre. Il ouvrit grand la fenĂȘtre, les volets frappant le mur.

- Ah, te voilĂ  enfin ! Entre, ma chĂ©rie.

Sylvia, une jolie blonde aux yeux bleu-vert, fit son entrée, repoussant d'un coup de pied une planche qui traßnait.

- Papa, qu'est-ce que tu veux ? J'allais me baigner à Chñlain, protesta Sylvia.

- Une jeune fille aussi belle que toi ne devrait pas avoir ce visage renfrognĂ©, un sourire serait bien plus agrĂ©able. Quatorze ans, et toujours dans l'Ăąge ingrat !

- Mais papa, j'aurai bientĂŽt quinze ans ! Et d'abord, tu n'y connais rien en Ă©ducation, tu es trop vieux pour ça ! Tu te rends compte que tu as l'Ăąge des papis ?

- Je sais, balbutia Davis, j'ai eu un enfant Ă  plus de soixante ans, mais est-ce vraiment ma faute ? Ta mĂšre Ă©tait si belle, si jeune... C'est justement d'elle que je voulais te parler.

- Laisse maman tranquille, elle est partie.

Le visage du vieil homme se ferma brusquement. Ses yeux se perdirent dans le ciel, puis se baissĂšrent vers le sol, pour enfin se poser sur sa fille. Quand il regardait les nuages, ses yeux devenaient gris et humides, mais lorsqu'ils se posaient sur Sylvia, ils prenaient une teinte bleue, douce et brillante.

- Ta mùre est partie, c'est vrai. Elle est morte parce qu'elle fumait trop ! Et ce n'est pas faute de l'avoir avertie !

Davis se lança alors dans un monologue sur l'absence de sa femme, la maladie, et la mort, ce qui ennuyait profondément Sylvia.

- Bon, papa, j'y vais.

- Non, surtout pas ! S'Ă©cria le vieil homme en attrapant la manche de sa fille, prĂȘte Ă  partir. J'ai quelque chose d'extraordinaire Ă  te montrer, une proposition incroyable. Tu vas adorer, j'en suis certain.

Davis prit le skateboard.

- Tu vois, ma chérie, toi qui adores le skate, j'ai fabriqué un longboard pour toi. Il est vraiment grand, prÚs de deux mÚtres. Je sais, ce n'est pas commun, mais il est aussi assez large pour que tu puisses dormir dessus.

- Tes inventions sont souvent Ă©tranges, papa, mais lĂ , c'est vraiment absurde ! Pourquoi voudrais-tu que je dorme lĂ -dessus ?

- S'il te plaĂźt, ma chĂ©rie, ne m'interromps plus, pour l'amour du ciel ! Tout ce que je vais te dire te semblera peut-ĂȘtre extravagant, mais fais-moi confiance, tu sais de quoi je suis capable.

- Parfois du meilleur, mais souvent, trĂšs souvent du pire ! Je ne sais pas si ce sont tes inventions qui te font perdre la tĂȘte ou l'inverse, mais...

- Cette fois-ci, Ă©coute-moi vraiment, sinon je vais me fĂącher !

AprÚs avoir posé un bout du skate géant sur l'établi et gardant l'autre en main, Davis fixa intensément sa fille.

- J'ai conçu cet engin pour que tu puisses retrouver ta mÚre. Elle est là-haut, dans le ciel, prÚs de Dieu et de la Vierge Marie.

Sylvia vivait seule avec son pĂšre, mais elle Ă©tait rarement Ă  la maison. Pendant les vacances, elle passait son temps avec ses copines. Les journĂ©es ensoleillĂ©es Ă©taient rĂ©servĂ©es aux baignades au lac et aux sĂ©ances de skate, les jours de pluie, c'Ă©tait shopping ou iPad, et toujours du skate. Son pĂšre l'adorait, mais il Ă©tait tellement absorbĂ© par ses recherches et ses inventions qu'il en oubliait souvent sa fille. Cet atelier avait dĂ©truit tant de moments de tendresse !

Sylvia connaissait bien les moments de folie de son pÚre, mais elle savait que la passion de ce dernier, bien que désordonnée et irrationnelle, était toujours motivée par l'envie de réussir des projets hors du commun. Cependant, l'idée de l'envoyer dans le ciel chercher sa mÚre en skateboard était un pas trop loin. Sylvia était décidée à réprimander son pÚre.

- Papa, je sais que tu es un peu cinglĂ©, que tes inventions farfelues te montent Ă  la tĂȘte, mais lĂ , tu dĂ©lires complĂštement ! Laisse maman en paix, et un skate volant, franchement !

Sylvia regarda son pÚre d'un air incrédule, ses sourcils se haussant d'absurdité. Le vieil homme remarqua l'agacement de sa fille dans ses yeux.

- Ce longboard peut voler. Je ne vais pas te donner trop de détails, je sais que la science ne t'intéresse pas beaucoup, mais je vais aller à l'essentiel pour que tu puisses l'utiliser sans problÚme. Cette planche que j'ai mise au point, elle peut voler.

Le vieil homme retourna le skate pour montrer le dessous.

- Les roulettes te serviront juste pour décoller, et les coussins d'air que j'ai ajoutés te permettront de glisser sur les nuages. Comme c'est un longboard, tu n'as plus besoin de poser un pied à terre pour te propulser, les mouvements de ton corps suffiront. Ma technique est un mélange de nanostructures, de rayons laser et de vapeur d'eau pour produire l'énergie cinétique nécessaire.

Sylvia écoutait attentivement, ses yeux écarquillés, suivant chaque geste de son pÚre. Le vieil homme se tourna vers la table en inox et saisit une combinaison blanche.

- Si tu vas dans les nuages comme je l'espÚre, tu devras enfiler cette tenue. Elle est recouverte d'un matériau nanocristallin qui capte les rayons solaires. Un laser concentrera l'énergie sur ton skate, qui alimentera le moteur miniature situé à l'arriÚre. Grùce aux nanotechnologies, j'ai réussi à faire en sorte que le moteur utilise un minimum de vapeur d'eau pour générer l'énergie nécessaire pour te maintenir en l'air. Ce longboard restera stable et glissera à la vitesse de ton choix, selon tes mouvements.

Le vieil homme, dans un Ă©tat d'euphorie, tremblant de tous ses membres, s'emballait, essayant d'entraĂźner sa fille dans son enthousiasme.

- Tu vois, ma chérie, j'ai inventé la planche magique, le tapis volant des contes des mille et une nuits.

- Mais papa, pourquoi ne vas-tu pas toi-mĂȘme dans les nuages ?

- Parce que je suis trop lourd. L'Ă©nergie pour maintenir le skate en l'air n'est pas assez puissante. Toi, ma chĂ©rie, avec ton poids plume, tu n'auras aucun problĂšme. Et puis, contrairement Ă  toi, je ne sais pas tenir sur un skate !

Sylvia connaissait le gĂ©nie de son pĂšre. Elle avait confiance en lui, mais cette histoire Ă  dormir debout, de retrouver sa mĂšre dans le ciel, c'Ă©tait du grand n'importe quoi !

AprÚs des heures d'explications interminables et les assurances que le projet était absolument sûr, Sylvia se laissait presque convaincre. Elle ne se faisait aucune illusion de retrouver sa mÚre au paradis, elle n'était pas aussi délirante que son pÚre. Mais l'idée d'une telle aventure la séduisait. Sylvia adorait voyager et l'idée de récolter la gloire d'une telle expédition la remplissait de fierté. Elle pourrait enfin se sentir supérieure à ses amis, son audace serait reconnue par tous, et le génie de son pÚre acclamé. Elle imaginait déjà la jalousie de ses copines et cela lui plaisait énormément.

- Tu es sûre que tu retrouveras maman, hein? Dis-moi que tu vas nous la ramener, s'il te plaßt?

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