Piégés par l'amour

Prologue :

........Junior HONVI..............

Dans une démarche des plus sensuelles, elle se rapproche de moi avec un sourire coquin. Je la dévore du regard. Elle tourne autour de moi très lentement tel un félin qui cherche le bon moment pour bondir sur sa proie. Cette femme a quelque chose qui m'attire irrésistiblement, je ne me lasse pas de la regarder, de lui faire l'amour, pas que je l'aime, juste que j'aime sa compagnie parce qu'elle me fait oublier l'autre, celle- là que j'aime en secret sans pouvoir le lui avouer. Je sais que je ne devrais pas penser à cette femme qui me hante l'esprit comme je le fais en ce moment mais c'est juste au-dessus de mes forces. Peut-être que la malédiction continue et que comme mon père et mon oncle avant moi, je suis voué à succomber à la tentation. Je suis d'ailleurs le fruit de la tentation et tout autour de moi me le rappelle sans cesse.

En fait, j'ai grandi dans une famille reconstituée où mon beau- père ne m'a jamais aimé. Il m'a certes donné un toit, payé mes études primaires, secondaires et même universitaires dans une prestigieuse université de Londres mais, je n'ai jamais eu droit à son affection (soupire). Ceux qui ont toujours compté pour lui sont ses enfants, sa première fille qui n'est pas de ma mère et les deux autres enfants qu'ils ont eu ensemble. Ma mère a fait ce qu'elle pouvait quand elle était encore de ce monde mais depuis qu'elle a quitté trop tôt ce monde, je n'existe plus pour personne. Ma grand-mère, la mère de mon père essaie tant bien que mal de m'apporter son affection et son soutien quand elle le peut mais, elle n'arrive pas à combler le grand vide d'affection qu'il y a en moi.

Aujourd'hui encore, je me demande pourquoi Dieu dans sa divine bonté a permis que je naisse dans une telle famille et que je sois condamné à vivre dans un foyer où je n'ai jamais compté. Je suis une erreur de jeunesse comme le dit souvent mon père biologique. Cet homme est l'une des rares personnes au monde qui me sort par les pores. Ne soyez pas surpris de m'entendre parler ainsi de mon père, retenez juste qu'entre nous, ce n'est pas l'amour fou, on ne se tolère même pas donc chacun vit dans son coin. Ce qui m'énerve le plus chez lui c'est le fait qu'il ne fasse rien pour se reconstruire suite à sa séparation avec son premier amour, la mère de son unique fille, il vit dans l'ombre de cet amour révolu et m'en veut d'être né (pfffff).

Il me tient pour responsable de son malheur alors que c'est lui qui couchait avec la fiancée de son oncle et qui a poussé tellement loin la bêtise en la mettant enceinte à quelques jours du mariage de cette dernière. Il oublie que je n'y suis pour rien, s'il ne voulait pas d'enfant il aurait dû se protéger et cela m'aurait évité d'atterrir dans une famille maudite. Oui, pour moi ma famille est juste maudite. Quand on parle des HONVI ici à Cotonou, tout le monde se souvient de Monsieur Alexis Sénior, mon père sur papier et encore mon oncle (sourire jaune), l'homme qui aurait abandonné une femme bien, celle qui avait fait de lui un homme digne et respectable pour une jeune étudiante qui aurait ruiné sa vie. Cette jeune étudiante est malheureusement ma mère, Pamela ADI.

On dit même par ici que Monsieur Alexis se faisait la mère et la fille en même temps, vous comprenez donc pourquoi je parle de famille maudite et que je préfère ne pas trop parler de mes origines. L'enfant de la honte que je suis, s'oblige à se concentrer sur son présent et son futur qui promettent d'être radieux.

- A quoi penses-tu mon loup ? dit Florica, me sortant ainsi de mes réflexions.

- A toi ma fleur, tu es si belle que j'ai follement envie de te posséder. Mais avant je veux te voir danser rien que pour moi.

- Avec plaisir mon chéri.

Elle monte sur l'estrade privée de danse sensuelle que j'ai fait aménager dans mon sanctuaire( ma chambre à coucher ) et s'active sous mes yeux. Je la regarde en pensant à cette autre femme à qui tout mon être aspire. Florica a des rondeurs presque identiques aux siennes, le même teint on aurait dit qu'elles sont des sœurs jumelles à la différence que l'autre, a quelque chose de plus. Sa voix et son visage d'ange m'ont séduit dès notre première rencontre et depuis ce jour, je ne rêve plus que d'elle. Je rêve de la voir danser pour moi comme Florica . Je rêve de la tenir dans mes bras, de lui faire l'amour et de l'entendre hurler mon prénom. Mais hélas, tout nous sépare et nous éloigne l'un de l'autre (soupir). Je reporte mon attention sur Florica qui se donne du mal juste pour mon plaisir.

- Approche Flori, donne-moi du plaisir avec ta bouche et tes doigts. Je veux que tu me prouves à quel point je compte pour toi.

- A condition que tu arrêtes de penser à elle quand tu es avec moi.

- A qui? Dis-je étonné.

- Tu me comprends très bien Junior, je ne suis pas aussi naïve que tu le penses. J'ai des yeux pour voir.

- Je ne comprends pas ce que tu insinues Florica.

- Junior, je vois très bien la manière dont tu la regardes, tu penses cacher tes sentiments pour elle mais moi, je lis très bien en toi, elle t'obsède au point que parfois il t'arrive de m'appeler par son prénom quand tu me fais l'amour. J'ai compris depuis bien longtemps que tu es avec moi, juste pour te consoler du fait que jamais tu ne pourras l'avoir elle. Tu m'obliges à m'habiller comme elle mais je ne serai jamais elle. Je suis moi, Florica DAVOU. Et si tu m'aimes réellement comme tu me le dis souvent tu dois oublier cette femme et m'accepter telle que je suis.

- Je ne vois toujours pas de qui tu parles, dis-je le cœur battant.

Je pensais avoir toujours su cacher mes sentiments pour elle,mais...... Non et non, Florica ne peut pas lire en moi, je ne peux permettre une telle chose. Je ne lui accorderais jamais ce privilège de sonder mon être, mon moi intérieur, non jamais.

- Tu comprends très bien ce que je dis Junior, je te parle de ton amour pour Elisa dit- elle avec un regard insistant.

Je la regarde un moment en silence en ouvrant de grands yeux avant d'éclater de rire. Je ris pendant un petit moment devant son regard maintenant confus avant de reprendre mon air calme et tout mon sérieux.

- Si jamais tu répètes cette ânerie, Florica DAVOU, considère que nous deux c'est fini. Je t'interdis de répéter les mots que tu viens de prononcer lui dis-je sur un ton cinglant qui se veut être convaincant.

- Je pensais que ............

- Que rien, habilles toi stp, je te ramène chez toi.

Sans écouter ses mots d'excuses, je vais l'attendre dans ma voiture en tremblant presque. Je dois faire plus attention, personne ne dois savoir que je meurs d'amour pour elle. Personne, sinon, je suis perdu. Il ne me pardonnera jamais s'il découvre ce que je pense d'elle. Je dois garder le secret sur cet amour qui me consume, autrement je risque d'y laisser ma peau. Florica me rejoins avec une petite mine coupable. Je ne lui laisse pas le temps de fermer la portière et démarre la voiture.

- Je m'excuse Junior, je ne voulais pas t'offenser avec mes paroles, je suis vraiment désolée.

- Réfléchis la prochaine avant d'ouvrir ta bouche Florica, je ne supporterai plus jamais une telle attitude de ta part.

- Je te jure sur ce que j'ai de plus cher que ça n'arrivera plus.

- Tu as raison parce que je ne le permettrai plus jamais. Tu n'en auras plus jamais l'occasion.

- Je ne comprends pas ce que tu insinues Junior.

Je conduis sans plus répondre à ses questions. Je pense que le mieux à faire c'est de quitter ce pays, je dois m'éloigner d'elle et reconstruire ma vie loin d'ici, loin de cet amour maladif qui me ronge chaque jour un peu plus.

................. Élisabeth AGONVI épouse DJIVO.................

Mon homme est en voyage depuis trois. Je me sens toute seule dans cette immense demeure que nous occupons tous les deux depuis six ans. Je marche lentement dans le jardin de la maison en imaginant ce qui aurait été ma vie si je n'avais pas décidé de faire ce sacrifice. Ma mère serait sans doute morte et mes frères livrés à eux même à cause de notre irresponsable de père qui ne fait rien pour s'occuper de ses huit enfants depuis plus de dix ans maintenant. Si je n'avais pas la mère que j'ai, je dirais que Dieu s'est trompé en m'envoyant ici-bas. Unique fille d'une famille de huit enfants, j'ai grandi en voyant mon père battre tous les jours ma pauvre mère pour un oui ou pour non. A une certaine époque encore mon père travaillait comme gardien dans une école privée et nous assurait le minimum pour vivre.

J'ai déserté très tôt les classes pour aider maman qui vendait des beignets aux coins de la rue. Mon père au fil des jours avait commencé à s'enivrer de vin de palme, à tel point que cela est devenu aujourd'hui sa raison de vivre (sourire jaune). Il boit pour vivre selon ses propre dires (soupir), maman s'occupait de nous avec ses maigres revenus jusqu'au jour où un chauffard la renversa dans la rue alors qu'elle allait au marché. Transportée à l'hôpital de toute urgence, on nous demanda d'apporter une somme colossale de trois cent mille pour les soins. Mon père ne pouvait rien y faire et nos familles des deux côtés ne levaient aucun doigt pour nous venir en aide. Je fis recours à Raïssa une amie du quartier où j'ai grandi. Elle me parlait sans arrêt d'un boulot très bien payé que je pouvais faire pour gagner beaucoup d'argent très rapidement.

Le responsable de l'agence où elle me conduisit, accepta de m'aider en m'empruntant l'argent dont jamais besoin à condition que je signe un contrat qui stipule que je devrais travailler pour lui pendant trois mois. Sans prendre connaissance des clauses du contrat, j'apposai ma signature et pris l'argent qui servit à sauver la vie de ma mère. Quand je revins à l'agence trois jours plus tard. Je fus étonnée d'entendre que le travail consistait à danser dans un club privé presque nue devant des hommes et faire pleins d'autres choses –que je n'oserai pas citer - avec eux. Je pris la résolution de refuser de me laisser utiliser sauf que derrière moi le gérant monsieur GANHOUTODE avait déjà pris toutes ses dispositions pour m'obliger à travailler pour lui.

Il me menaça de rendre la vie impossible à mes frères et de faire tuer mon père si je refusais de lui obéir.

Prise au piège et pour la sécurité des miens, j'ai alors accepté de faire ce travail et de perdre ma dignité. C'est ainsi que moi, Élisabeth la jeune fille de 19 ans qui n'avait jamais connu d'homme de sa vie se retrouva un soir dans un bar privé rempli d'homme avec pour seul vêtement deux morceaux de tissu, maquillée comme une dévergondée avec des chaussures à talon hauts pour ma première prestation. Ce soir-là même, je fis la connaissance de Samuel DJIVO un habitué du coin selon Raïssa qui jeta son dévolu sur moi. Ce dernier venait de perdre sa seconde épouse Pamela ADI la mère de ses deux derniers enfants et était presque dépressif. Notre première nuit, bien qu'elle fut la plus horrible de ma vie, me permit de quitter le club et sortir ma famille de la misère.

Aujourd'hui, je suis devenue la propriété de Samuel. Et comme il aime à le dire, « il m'a achetée, je lui appartiens ». J'ai droit à de beaux vêtements, une vie de reine et tout ce que les autres voient ici parce que Samuel est très riche. Mais au fond, je suis juste son trophée. Il m'oblige à faire des choses en secret que je n'ose avouer à personne. Je regrette chaque jour ma vie à ses côtés. Je me rends compte aujourd'hui que j'ai quitté le fond de l'abîme pour l'enfer. Aujourd'hui encore, je me demande s'il n'est pas derrière la mort de ses deux premières épouses qui sont toutes les deux mortes de façon tragique (soupire). Le Klaxon de la voiture de Samuel me fait revenir à la réalité, j'essuie les larmes qui perlaient sur mes joues et me compose une mine de circonstance pour l'accueillir.

Je retourne très vite à l'intérieur et réajuste ma tenue en me regardant dans le miroir accroché au mur de notre chambre. Je me dois d'être irréprochable quand il revient de ses voyages. Je me refais une beauté et ressors l'accueillir avec un sourire feint. Je vais à sa rencontre la mort dans l'âme mais à ma grande surprise, je le vois entrer suivie de Junior le fils de sa deuxième épouse défunte et mon cœur, comme toujours bat à un rythme effréné. Je me sens revivre rien qu'en posant les yeux sur lui. Il encore plus beau que dans mes souvenirs. Il y a plus de deux mois qu'il est passé nous voir ici. Je garde encore à l'esprit son dernier passage chez nous avec cette femme qui me ressemble étrangement. J'ai passé ce soir-là une salle nuit parce qu'il était venu dire à son beau-père, mon mari qu'il voulait officialiser sa relation avec cette femme.

Samuel n'a jamais aimé Junior comme un fils, mais il s'est toujours assuré qu'il ne manque de rien. Au début de notre mariage Junior, le fils aîné de sa défunte épouse vivait à Londres, il lui envoyait de l'argent et s'assurait qu'il allait bien sans jamais s'impliquer émotionnellement dans sa vie. Il ne l'appellait que pour ses anniversaires et quelques rares fois, juste par obligation ce qui n'est pas le cas avec ses trois autres enfants qui vivent tous en Californie. Après ses Études, Junior est le seul qui ait décidé de revenir au pays au grand étonnement de mon mari. Aujourd'hui il travaille dans une entreprise Textile de la place et il semblerait qu'il soit bien payé.

- A quoi penses-tu Eliza ? La voix grave de mon mari me ramène à eux.

- A rien mon amour, dis-je avec un sourire de façade.

- Bonsoir maman, dit Junior en fuyant mon regard.

- Bonsoir Junior, comment vas-tu ?

- Bien et vous ?

- Je vais bien, que nous vaut l'honneur de ta visite ?

- Il vient nous dire qu'il quitte la ville dit Samuel presque Agacé. Je ne comprends toujours pas pourquoi il s'obstine à rester dans ce pays où il n'a rien et où rien ne le retient. Sa vrai famille se préoccupe pas de lui et ........

- Papa, j'aime mon pays dit Junior pour mettre fin aux dires de mon mari qui prends toujours un malin plaisir à mal parler de la famille HONVI et du père de Junior qui ne s'occupe pas de son fils.

- La vérité est amère mon fils mais, il vaut mieux l'accepter.

Je laisse le père et le fils se chamailler comme toujours et me dirige vers ma cuisine. Samuel ne tardera pas à me crier qu'il meurt de faim. J'ai demandé à la cuisinière de nous faire un repas simple mais je le regrette maintenant, si je savais que Junior venait j'aurais fait son repas préféré. J'ai adopté Junior dès le premier soir où il m'a été présenté. Nous avons rapidement sympathisé et je lui ait parlé de ma vie et lui de la sienne. J'ai pensé avoir trouvé en lui un ami et un confident mais il s'est subitement éloigné de moi au moment où je commençais à ressentir plus que de l'amitié pour lui.

Je me suis rendu compte de mes sentiments pour lui le jour où il est venu nous rendre visite avec cette Florica. La voir lui prendre la main et lui sourire m'a rendu folle de jalousie. Depuis, il se fait rare ici et le pire de tout c'est qu'il veut s'en aller de la ville maintenant. Je ne sais pas ce que je dois faire pour le retenir mais mon cœur de femme me crie de ne pas le laisser s'en aller. Je sais que je m'apprête à faire une folie mais pour une fois, je veux vivre dangereusement même si je dois y laisser ma vie..........