C'est l'histoire d'Une jeune femme au caractĂšre austĂšre et distant avec le monde qui l'entoure, la solitude et le silence valent mieux pour elle que d'ĂȘtre entourĂ©e de ses proches. Un soir, alors qu'elle se retrouvera dans un bar, le jour de la commĂ©moration du dĂ©cĂšs de son pĂšre, elle se verra raconter son histoire Ă une serveuse indiscrĂšte. Entre joie, amour, regrets, dĂ©ceptions et douleurs, Elle ouvrira son cĆur meurtri Ă une inconnue sans se douter que la vie est si souvent surprenante...
Il y a plusieurs choses dans la vie qui m'agacent et le bruit en fait partie, je masse mes tempes en regardant mon neveu, Pablo, qui s'évertue à crier à pleins poumons en faisant voler son avion en jouet de sa petite main. Du haut de ses cinq ans, ce petit a beaucoup trop d'énergie. Je demeure assise sur ma chaise et je porte mon verre de cocktail à mes lÚvres, c'est froid et sucré, j'aime ça.
Un gros bruit se fait entendre, Pablo vient de faire tomber des assiettes qui étaient posées sur la table, je soupire en déposant mon verre, je sens que je vais me faire rabùcher les oreilles d'ici peu.
« Non, mais, c'est quoi tout ce désordre ! »
Qu'est-ce que je disais ?
La voix stridente de ma petite sĆur, Victoire, vient de se faire entendre, elle est debout, les mains sur les hanches, et semble Ă©valuer le dĂ©sordre que son fils a fait dans son salon.
- Qu'est-ce qui se passe ici ? Ayana, comment peux-tu regarder Pablo faire autant de désordre sans rien dire ? hurle-t-elle en me regardant.
Je ne comprendrai jamais cette manie qu'ont les mĂšres de crier Ă tout-va, ne peuvent-elles pas s'exprimer calmement ? Et pourtant, on peut bien se faire entendre sans aucun hurlement.
- Ayana, je te parle !
Je hausse les Ă©paules.
- Que voulais-tu que je fasse ? Il vit sa vie, dis-je sur un ton détaché.
- Il vit sa vie ? Tu es sérieuse lorsque tu dis qu'un garçon de cinq ans vit sa vie ? Tu te moques de moi là , Ayana !
Des pas se font entendre, notre mĂšre, MarlĂšne Oyiba, entre dans le salon avec un plateau dans ses mains.
- Que se passe-t-il ici ? fait-elle en déposant le plateau sur la table qui est devant moi.
- Il se trouve que ta fille ici prĂ©sente a laissĂ© son neveu faire tout ce dĂ©sordre alors qu'elle pouvait bien l'en n'empĂȘcher. Ayana n'est mĂȘme pas capable de surveiller Pablo juste quelques petites minutes.
Je plonge ma main dans le plateau et je pioche un cornichon couvert de ce qui me semble ĂȘtre du jambon sur un cure-dent, je fourre le tout dans ma bouche.
- Je fais comment maintenant ? BientÎt les invités arrivent et je dois encore ramasser tout ce désordre, est-ce que tu sais que je suis debout depuis ce matin à cuisiner et qu'actuellement, je suis épuisée ?
- Rien Ă foutre ! dis-je, calmement en fixant ma sĆur.
- Ayana ! fait notre mĂšre sur un ton de reproche.
- Tu vois maman ? s'insurge Victoire. Est-ce que tu vois comment Ayana est ? Tu vois comment ta fille est ?
Je me lĂšve de ma chaise, je vide mon cocktail, puis je prends mon sac Ă main.
- Au revoir, dis-je.
Je me dirige vers la porte et je sors de la maison de ma sĆur.
- Tu n'avais pas envie d'ĂȘtre lĂ de toute façon, entends-je dire Victoire.
Elle a beau ĂȘtre bruyante ma sĆur, mais elle a raison, je n'avais aucune envie d'ĂȘtre chez elle pour cette fĂȘte en l'honneur de la promotion qu'elle a eue Ă son travail, le fait de devoir voir et discuter avec les amis et collĂšgues parfaits de ma sĆur m'aurait irritĂ©e plus qu'autre chose. De toute maniĂšre, je sais ce que l'entourage de ma sĆur pense de moi : que je suis une femme froide, insensible et dĂ©sagrĂ©able. Ce qui est d'ailleurs vrai, je crois mĂȘme que tout le monde autour de moi pense ainsi et pour ĂȘtre franche, cela ne me fait absolument ni chaud ni froid.
« Bonjour »
Je lĂšve la tĂȘte vers cette voix, c'est le voisin de Victoire qui a emmĂ©nagĂ© dans la maison d'en face il y a quelques mois, je le sais parce que maman a dit au cours d'une discussion entre Victoire et elle en ma prĂ©sence qu'elle connaissait sa mĂšre. Le voisin qui me semble avoir une trentaine d'annĂ©es tient la laisse d'un chien qui s'agite vivement Ă ses pieds, cet homme me fixe attendant surement le remuement de mes lĂšvres, je le dĂ©passe sans rĂ©pondre Ă sa salutation. Je n'ai aucun problĂšme avec lui, c'est juste que je ne vois pas l'utilitĂ© de lui dire « bonjour » en retour, j'ai mieux Ă faire.
Je monte dans ma voiture que je conduis en direction de chez moi. Une fois dans mon appartement, je me dirige dans ma chambre et je me jette sur le lit, je ferme les yeux en soupirant d'aise. Je prĂ©fĂšre largement le silence de ma chambre que de m'efforcer Ă ĂȘtre Ă la fĂȘte de Victoire qui doit certainement ĂȘtre en train de me maudire dans son cĆur actuellement, mais je suis dĂ©jĂ habituĂ©e.
Six mois plus tard,
Aujourd'hui c'est mon dernier jour de la semaine au travail, le week-end peut enfin dĂ©buter. J'ai hĂąte de rentrer chez moi. Je ne suis pas de ces personnes qui ont des gens qui les attendent Ă la maison, aucun compagnon ni d'enfant ne m'attend, mon appartement est totalement vide, mais n'empĂȘche que chaque jour aprĂšs le boulot, je me presse d'ĂȘtre parmi les premiĂšres personnes de cette entreprise Ă partir tĂŽt.
Je sors de mon bureau aprĂšs avoir rangĂ© mes affaires, je me dirige vers la sortie sans adresser la parole Ă qui que ce soit, je n'ai aucune familiaritĂ© avec mes collĂšgues, je prĂ©fĂšre garder mes distances et je suis sĂ»re qu'ils ont compris au fil du temps qu'ils devaient en faire de mĂȘme, de toute façon mon poste de comptable m'Ă©vite bien les discussions inutiles avec certains employĂ©s, je discute juste avec qui de droit et surtout lorsque cela est nĂ©cessaire concernant le boulot.
Lorsque j'arrive Ă mon appartement, je me jette dans les draps aprĂšs avoir pris ma douche, je veux juste dormir.
***
La musique sert Ă adoucir les mĆurs, parait-il, j'ai beau en Ă©couter, mais cela ne fonctionne pas avec moi, je ne suis certainement pas la cible. J'augmente le volume de cette chanson que diffuse mon ordinateur portable et je me lĂšve du lit en chantonnant Ă tue-tĂȘte. J'ouvre mon placard et j'en sors une robe noire droite que je sais parfaite sur mon corps. J'enfile la robe en prenant soin de porter des sous-vĂȘtements en dentelle.
Je prends ma trousse à maquillage et je me place devant mon miroir. La chose qui est fabuleuse avec le maquillage, c'est qu'il arrive aisément à camoufler les imperfections, j'aurais aimé qu'il puisse aussi cacher les imperfections de ma vie toute entiÚre, mais on ne peut malheureusement pas tout avoir.
Mon téléphone sonne, je découvre en regardant l'écran que c'est ma mÚre.
- AllÎ ? dis-je en décrochant.
- Ayana dis-moi, qu'est-ce que je t'ai fait de mal ?
La voix de mĂšre est tremblante, elle a sans aucun doute pleurĂ©. Je m'assois sur mon lit, je connais dĂ©jĂ la raison de cet appel et je sais comment ça va se terminer. Depuis cinq ans, Ă la mĂȘme date du mĂȘme mois, c'est la mĂȘme chose qui se rĂ©pĂšte Ă chaque fois.
- Qu'est-ce que j'ai encore fait ? demandé-je sur un ton moins détaché que je le voudrais.
- Aujourd'hui c'est la date du dĂ©cĂšs de ton pĂšre et nous avons fait un tour au cimetiĂšre et ça tu le sais parfaitement ! Mais tu n'as mĂȘme pas daignĂ© faire le dĂ©placement, Ayana, on ne parle pas d'un inconnu ou d'un simple membre de la famille, mais de ton pĂšre, dit-elle en reniflant.
Je dépose le téléphone sur mon lit et j'active le haut-parleur.
- Pourquoi... snif... pourquoi agis-tu ainsi ?
Je ne réponds pas, je prends cette question de maniÚre rhétorique, c'est bien connu, les parents adorent les questions rhétoriques.
- Mon mari est mort, ton pĂšre est mort et depuis son enterrement, tu n'as plus jamais mis les pieds au cimetiĂšre. Et mĂȘme lorsque nous nous rĂ©unissons en famille afin de lui rendre hommage, tu ne te dĂ©places pas, tu n'en as rien Ă faire, ça me fait tellement mal.
Ma mÚre éclate en sanglots, je l'écoute pleuré sans dire un seul mot.
- Tu pourras avoir d'autres amis, tu pourras rencontrer d'autres amours, mais un parent, on ne le remplace jamais ! Jamais, Ayana !
Une autre voix me parvient Ă l'autre bout du fil.
- AllĂŽ, Ayana ?
C'est la voix de Victoire, elle a pris le téléphone de notre mÚre.
- Je t'Ă©coute, dis-je, calmement.
- Ayana, je sais que tu t'enfiches de tout le monde, je sais que tu t'en fiches de nous et qu'il n'y a que ta petite personne qui t'intĂ©resse, mais pour la mĂ©moire de papa, pourquoi ne veux-tu mĂȘme pas faire un effort ?
Je fixe le mur devant moi, mine de rien, le jaune est une couleur qui ressort bien à l'intérieur d'une maison.
- Tu es ma grande sĆur, Ayana, et pourtant tu t'Ă©vertues Ă agir en irresponsable, pour papa tu peux bien mettre ton Ă©goĂŻsme de cĂŽtĂ©, ça fait cinq ans que papa est partie et...
La voix de ma sĆur se brise, l'Ă©motion dans sa voix me montre qu'elle est Ă deux doigts de pleurer.
- J'ai compris, Victoire, au revoir.
Je raccroche sans lui donner le temps d'en placer une, je mets mon téléphone en mode silencieux.
Je me lĂšve du lit et je me replace devant mon miroir. Mon pĂšre Ă©tait vraiment un homme exceptionnel, un homme bien, et aujourd'hui, j'agis comme une Ă©goĂŻste sans cĆur et je sais que c'est mal, mais c'est ainsi que les choses sont faites.
AprÚs un dernier coup de fond de teint, je couvre mes lÚvres d'un rouge à lÚvres, couleur rouge sang qui me va si bien. Je prends mon sac à main, j'y fourre mon téléphone. Une fois à l'extérieur de la maison, j'avise l'heure, 21 h 38, je suis dans les temps.
Je marche une qinzaine de minutes, puis j'arrive devant un bar. Je pĂ©nĂštre dans la salle, j'Ă©value du regard le nombre de personnes qui sont assis dans ce bar, il y a quand mĂȘme assez de monde ce soir.
Je me dirige au fond de la salle, je m'assois à une table vide et je dépose mon sac sur la table.
« Bonsoir »
Je lĂšve la tĂȘte, une serveuse se tient devant moi avec un calepin et un crayon dans ses mains.
- Bonsoir, réponds-je
- Qu'est-ce que je vous sers ?
- Une bouteille de Baileys avec des glaçons.
- D'accord.
Elle se retourne et s'en va.
Je pointe mon regard sur la salle qui s'active vivement autour de moi, je reste silencieusement assise, je regarde simplement le monde.
Chapitre 1 1
28/01/2024
Chapitre 2 2
28/01/2024
Chapitre 3 3
28/01/2024
Chapitre 4 4
28/01/2024
Chapitre 5 5
28/01/2024
Chapitre 6 6
28/01/2024
Chapitre 7 7
28/01/2024
Chapitre 8 8
28/01/2024
Chapitre 9 9
28/01/2024
Chapitre 10 10
28/01/2024
Chapitre 11 11
28/01/2024
Chapitre 12 12
28/01/2024
Chapitre 13 13
28/01/2024
Chapitre 14 14
28/01/2024
Chapitre 15 15
28/01/2024
Chapitre 16 16
28/01/2024
Chapitre 17 17
28/01/2024
Chapitre 18 18
28/01/2024
Chapitre 19 19
28/01/2024
Chapitre 20 20
28/01/2024
Chapitre 21 21
29/01/2024
Autres livres par Divine ST
Voir plus