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Les chroniques du perroquet Ă  poil

Les chroniques du perroquet Ă  poil

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5.0
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30
Chapitres

Un oiseau sans plume est un oiseau Ă  poil. C'est Coco, un beau perroquet gris du Gabon, quinquagĂ©naire en pleine dĂ©pression, qui m'en fit la surprenante rĂ©vĂ©lation. Mais si vous lisez ces quelques lignes, c'est que toutes ses belles plumes ne sont pas tombĂ©es en vain. J'en ramassai une, un beau matin, pour de sa belle et tendre pointe, vous adresser ces mots. J'avais entrepris de conter son histoire. Je me suis racontĂ© moi-mĂȘme et, d'anecdote en anecdote, me suis dĂ©nudĂ© Ă  mon tour. Je suis vĂ©tĂ©rinaire. Lorsque j'Ă©tais tout jeune praticien, je vĂ©cus bien des aventures professionnelles, toutes plus cocasses les unes que les autres, Ă©mouvantes parfois, surprenantes toujours. Je les savais du moins suffisamment incroyables, pour remonter le moral de mon malicieux et loquace volatile, qui est encore pour moi, Ă  ce jour, un compagnon de vie. À PROPOS DE L'AUTEUR Yves Le Genchant a toujours eu beaucoup plus de passions que de temps pour les assouvir. Celle des animaux et de leurs histoires a occupĂ© l'essentiel de sa vie tant personnelle que professionnelle. À prĂ©sent, il s'adonne sans retenue Ă  celle qui, nĂ©e trente ans plus tĂŽt dans les salles d'Ă©tudes de son lycĂ©e pyrĂ©nĂ©en oĂč il s'essayait dĂ©jĂ  aux nouvelles humoristiques, peut abondamment se nourrir de la richesse et de la diversitĂ© de toutes ses expĂ©riences : l'Ă©criture.

Chapitre 1 No.1

Préface

Faire prĂ©facer son ouvrage par un illustre inconnu, quelle malice, quelle audace ! Du moins, c'est ce que je me suis exclamĂ©, lorsque Yves m'en fit l'immense honneur, la surprenante demande. Le sujet, il est vrai, s'y prĂȘtait grandement, presque pour moi, avec gourmandise. Jeter le regard de mon exercice professionnel et de ma propre expĂ©rience, sur les tribulations d'un jeune vĂ©tĂ©rinaire aux balbutiements de son art, quoi de plus lĂ©gitime finalement ?

Mais, de lĂ  Ă  conclure qu'il se soit amplement inspirĂ© des nombreuses anecdotes qui ont peuplĂ© nos nocturnes et bouillonnants tĂȘte-Ă -tĂȘte, il n'y aurait peut-ĂȘtre qu'un pas. Ce pas, Yves, poussĂ© par l'enthousiasme si communicatif qui sans cesse l'habite, semble l'avoir allĂšgrement franchi avec ses truculentes Chroniques de son non moins ineffable Perroquet Ă  poil. L'Ă©tonnante rencontre entre l'extravagance des situations et la sage pertinence de leur sous-titrage, confĂšre Ă  son rĂ©cit, une Ă©mouvante dimension aux confins du rĂ©el.

Il est sans doute alors temps de préciser ici, que si certains lecteurs portés par une imagination débordante, étaient tentés de reconnaßtre lieux ou personnages familiers, ce ne serait évidemment que pure coïncidence, esquisse subtile des desseins impénétrables de notre facétieux Univers. Qu'ils soient en un mot rassurés, car l'essence de leur vie est à ceux qui sauraient le voir, largement plus incroyable.

Seul, en fin de compte, le vĂ©ritable hĂ©ros de ce pictural et pittoresque roman Ă©chappe Ă  cette rĂšgle. En ce qui le concerne, tout est vrai mĂȘme si les couleurs de sa rĂ©alitĂ© sont encore bien plus Ă©clatantes.

P. BarthélémyPrologue

À la question « Qui es-tu ? », n'ai-je pas trop souvent rĂ©pondu « ce Que je suis » ? Non, rassurez-vous, ceci n'est ni un test de comprĂ©hension pour apprĂ©hender ce qui suit ni un invendu des derniers sujets du BAC en visio. Voyez-y plutĂŽt le fruit d'une humble rĂ©flexion, celle d'un homme qui, au cours du temps, s'est dĂ©fini plus par ce qu'il devait ĂȘtre, que par ce qu'il Ă©tait vraiment. TrĂšs vite, mon amour du Vivant a tracĂ© ma voie, piquant ici ma curiositĂ©, touchant lĂ  ma sensibilitĂ©. Je voulais comprendre le sensible des ĂȘtres pour mieux voir chez eux l'insensible, le discret.

Ma vocation m'a ainsi pris la main pour la tendre vers pattes et poils, bec et plumes. De fil en aiguille, de consultations en interventions, nombre de mammifĂšres en tous genres, d'oiseaux et autres reptiles me racontĂšrent leur histoire. Il y eut des larmes bien sĂ»r, des sourires aussi et tant d'Ă©motions surtout. Homme-animal, animal-homme, Ă  se demander parfois lequel accompagnait l'autre. Je n'aurais certes jamais pu m'en moquer, tant de fois avais-je dit moi-mĂȘme, que le sens de l'Ă©volution n'Ă©tait pas forcĂ©ment celui que Darwin avait pu lui prĂȘter. J'en prenais pour preuve le regard un tantinet condescendant que me lançait du canapĂ©, mon chat avachi au matin, lorsque je quittais la maison pour aller travailler. Je l'entendais presque m'envoyer Ă  la volĂ©e : « Eh machin, n'oublie pas de ramener mes croquettes en rentrant du boulot ! » Clairement, cette scĂšne n'Ă©tait pas pour m'inspirer une confiance absolue dans ma soi-disant « supĂ©rioritĂ© intellectuelle ».

Quoiqu'il en soit, il y avait bien une leçon que mes toutes premiĂšres expĂ©riences professionnelles m'avaient clairement invitĂ© Ă  retenir : la seule chose que tu peux prĂ©voir, bonhomme, c'est qu'implacablement se produira l'imprĂ©visible. Que cela est inconfortable pour l'homme moderne ! Ne pas pouvoir prĂ©voir, ne pas contrĂŽler, ne pas forcĂ©ment tout analyser, et parfois mĂȘme comprendre sans vĂ©ritablement tout savoir. VoilĂ  tout le dĂ©fi de notre exercice, marier un savoir approximatif Ă  une dĂ©licate expĂ©rience pour, expression crĂ©atrice et art ultime du praticien, en retirer une belle connaissance. Celle-ci se manifeste par la dĂ©cision, parce qu'il s'agit bien de cela finalement : dĂ©cider. VoilĂ  le sel, la touche de l'homme, la rĂ©ponse faite Ă  la question : « Êtes-vous un automate ? ». C'est la voix de notre conscience et celle de notre Ăąme, qui nous accompagnent alors dans la terrible Ă©preuve du choix. Rabelais nous prĂ©venait ainsi : « Science, sans conscience, n'est que ruine de l'Ăąme ». Accepter l'erreur devient alors le seul salut et le sauf-conduit pour de meilleurs lendemains.

Je m'y suis toujours Ă©vertuĂ©, convaincu qu'il n'y avait ainsi jamais de mauvaise dĂ©cision, mais seulement des choix mal assumĂ©s. J'ai donc pu longtemps butiner ma profession, avec la lĂ©gĂšretĂ© et la douce insouciance des premiers jours, entier, sincĂšre et dĂ©vouĂ©. Mais « les ailes de l'espoir » peuvent s'user avec le temps et les rĂȘves d'antan, ne devenir que les dĂ©risoires illusions du prĂ©sent. Peu Ă  peu, si l'on ne prĂȘte garde, la blouse prend le pas sur le corps, et la plume sur le cƓur. Lorsqu'on n'est alors que ce que l'on a, on n'est plus. Je n'Ă©tais dĂ©jĂ  presque plus, quand il m'apparut.

Et il avait beaucoup, beaucoup Ă  me raconter.

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Dans le quartier rĂ©sidentiel West Brunswick Il Ă©tait dix heures du soir. J'ai ouvert la porte et je suis entrĂ©e dans une maison J'ai allumĂ© les lumiĂšres Les lumiĂšres du lustre en cristal de la chambre d'amis ont projetĂ© mon ombre sur les fenĂȘtres du sol au plafond Cette maison serait mon domicile conjugal demain Et mon fiancĂ© Perry Bart, directeur de dĂ©partement d'une entreprise, Ă©tait beau et attentionnĂ© J'avais beaucoup de chance d'avoir rencontrĂ© un tel homme dans ma vie Selon les traditions du mariage , nous ne pouvions pas nous voir la nuit prĂ©cĂ©dant le mariage Perry Ă©tait dans notre domicile conjugal tandis que je vivais dans la maison de ma meilleure amie Liliana Avant d'aller me coucher, j'avais vĂ©rifiĂ© les choses dont j'aurais besoin le lendemain et j'avais dĂ©couvert que j'avais oubliĂ© mon voile de mariĂ©e dans notre domicile conjugal J'Ă©tais donc rentrĂ©e discrĂštement dans cette maison sans appeler Perry Ă  l'avance, juste pour le surprendre En pensant qu'aprĂšs demain , Perry et moi rĂ©ussissions Ă  vivre heureux ensemble pour toujours , j'Ă©tais toute souriante J'ai mis mes pantoufles et je suis dirigĂ© vers le salon En marchant, j'ai entendu des gĂ©missements de plaisir d'une femme . J'Ă©tais choquĂ©e La porte de la chambre principale Ă©tait entrouverte Et la voix fĂ©minine en est sortie Soudain, j'ai senti un feu furieux brĂ»ler en moi, et mes jambes Ă©taient engourdies Mais je me suis quand mĂȘme approchĂ©e involontairement Debout devant la porte, je pouvais clairement entendre les cris de jouissance Ă  l'intĂ©rieur, ils devenaient de plus en plus clairs, et Ă  chaque cri mon cƓur se serrait fort La porte Ă©tait Ă  peine fermĂ©e J'ai poussĂ© lĂ©gĂšrement la porte et elle s'est ouverte J'ai vu des talons hauts, des sous vĂȘtements et des bas d'une femme sur le sol Il Ă©tait difficile Ă©parpillĂ© de ne pas imaginer des choses quand je voyais cela. J'ai supportĂ© de force ma colĂšre et ma panique et j'ai regardĂ© vers le lit Un seul regard et le chagrin d'amour ont failli m'Ă©touffe

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