Prisonnière de son temps
« s'amuser» avec moi. C'est ce qu'il me dit, qu'on ne fait rien de mal, nous ne faisons que nous « amuser ». Je n'ai plus autant mal que durant les premières fois que nous nous « amusions » ensembl
llé par la sueur. J'essaie de reprendre mes esprits tout en repensant à ce rêve bizarre. À chaque fois que je repense à mon rêve les jours qui ont suivis, un frisson me gagne. Cet homme que j'ai vu, même si je n'ai pas reconnu son visage me semblait familier. Il me semblait tourmenté. Quelques jours plus tard, les résultats de mon examen sortent. Je suis admise à l'examen d'entrée en 7ème année avec mention très bien. Je pleure de joie, mais aussi de tristesse parce que je sais que j'en ai fini l'école. Mon amie Djouldé est également admise. Elle va à la capitale pour poursuivre ses études. -C'est bien que tu sois admise mais malheureusement pour toi, ton apprentissage s'arrête ici. Tu vas être comme moi, comme toutes les femmes de ce village, femmes au foyer. Maman me regarde avec cet air que je connais maintenant trop bien. Froideur et haine. J'essuie mes larmes avec rage, et me lève au près d'elle, résignée. Je ne peux plus continuer à aller à l'école, il faut que je l'accepte. **** L'année de mes 12 ans, tous les jeunes hommes en âge de se marier de notre village sont venus demander ma main. A chaque fois, mon oncle répond toujours par la négative. Il trouve toujours qu'aucun homme n'est assez bien pour moi. Il a toujours trouvé quelque chose à reprocher à chacun des prétendants qui se sont présenté chez nous. Ma mère quant à elle, prie nuit et jour pour se débarrasser de moi. Elle dit oui à tout le monde. Même si le fou du village venait demander ma main, elle serait d'accord. Ça fait deux ans que j'habite avec ma mère et deux longues années que mon oncle me convainc que ce qu'il me fait n'est pas grave. Qu'il s'amuse avec moi comme un oncle aimant le ferait avec sa nièce chérie. Je ne sais pas si personne ne s'est rendu compte de ce qui se passe depuis tout ce temps, ou si tout le monde ferme les yeux. Ce qui est sure, je subis toujours ses assauts à chaque petite occasion. Mon amie Djouldé est partie depuis deux ans et elle n'est plus revenue même pour passer ses vacances. Moi, je suis là, je chôme, je vais au champ quelque fois, j'accompagne ma mère au marché. Mon corps s'est complètement transformé, je fais plus grande et plus femme que mon âge. Mes hanches sont plus larges et ma poitrine plus développée. -Bonjour, Mouminatou. -Bonjour Koto Daouda. Tu as besoin de quelque chose ? -Je suis revenu me changer pour aller aider au champ. Je ne veux pas salir mon habit de prière. Dit-il en entrant dans leur case. Il me dit au revoir et vas rejoindre les autres. Koto Daouda, c'est le fils ainé de mon oncle qui vient d'arriver de la Mauritanie ou il a appris la mémorisation du coran. Comme son père, il a une grande connaissance des écrits saints. Il a une peau très claire et une démarche nonchalante. Il ne donne pas l'impression, mais il a un caractère bien trempé. Et j'ai la forte sensation qu'avec son père, le torchon brule. Il n'est pas aussi intimidé par lui que les autres. Ce soir là, après la prière du crépuscule, pendant que nous étions sur les nattes à la belle étoiles, Koto Daouda a posé la question de savoir pourquoi je n'allais plus à l'école alors qu'il a apprit que j'avais décroché mon examen avec mention très bien. -Il n'y a pas de collège dans ce village. Toi-même tu le sais. répond maman. -Dans ce village peut-être, mais à Labé si. Elle peut aller y poursuivre ses cours. Propose Koto Daouda. -Elle reste avec sa mère ici. C'est la seule enfant qu'elle a. Renchérie mon oncle qui est était resté silencieux jusque là. -Et puis, elle va aller chez qui à Labé ? Je ne vais imposer cette fille et son Karma à personne. Lance maman. -Elle peut aller chez Tantie Safiatou. Je vois mon oncle se renfrogner. Il égraine son chapelet avec rage. Mon regard passe de mon oncle à son fils. Ils se défient du regard un moment avant que mon cousin ne détourne les yeux. -Je vais appeler Tantie Safiatou demain pour lui en parler. Si elle est d'accord, elle partira le plus tôt que possible. Je jubile à l'idée de quitter ce village dans un avenir prochain. Mais je ne m'emballe néanmoins pas, connaissant à quel point je suis chanceuse. Comme promis, dès le lendemain, Koto Daouda entre en contact avec la fameuse Tantie Safiatou qui ne trouve aucun inconvénient à ce que je vienne m'installer chez elle le temps de mes études, surtout que tous ses enfants sont grands. Certains sont mariés et d'autres sont à la capitale pour les études universitaire. Ma mère rumine mais je n'y fais pas attention. Elle me provoque et cherche une excuse pour me garder ici. Je ne vais pas lui en donner l'occasion. Le jour suivant, après les prières du soir, mon oncle soulève encore la question de mon départ. -Daouda, Mouminatou ne partira pas à Labé. Nous avons tous besoin d'elle ici. Il n'ya aucune fille pour aider les femmes à la cuisine, dit mon oncle. -Avant qu'elle ne vienne vivre ici, comment les mamans faisaient. Elle va aller à Labé dès la semaine prochaine et je vais l'y accompagner moi-même. Répond Koto Daouda. -Tu ne devrais pas insister autant pour qu'elle parte, Daouda. Cette fille n'a aucune éducation, ma mère l'a trop gâtée. Je ne voudrais qu'elle aille créer des problèmes à Safiatou à Labé. Je regarde ma mère avec les yeux grands ouverts. Elle me cri à chaque fois qu'elle veut que je disparaisse de sa vie, maintenant que Dieu est sur le point de réaliser ses prières, elle sort autre chose. Cette femme serait-elle bipolaire ? -Depuis que je suis rentré de la Mauritanie, j'observe chaque membre de cette famille et je peux affirmer que cette petite peut être tout sauf impolie. Réplique mon cousin à mon plus grand bonheur. Mon oncle se lève subitement de sa chaise longue et se dirige vers sa case tout en demandant à ma mère de le suivre. Je les suis du regard jusqu'à ce qu'ils disparaissent dans la chambre. Une dizaine de