Vienne ! Ma mĂšre m'a donnĂ© ce nom car elle prĂ©tend avoir rencontrĂ© mon pĂšre lĂ -bas. A Vienne. Ă l'Ăąge de dix ans, c'Ă©tait le coup de foudre paraĂźt-il. Je n'ai jamais mis les pieds lĂ -bas et franchement, ce n'est pas une destination qui me fait rĂȘver. On s'est toujours moquĂ© de moi Ă cause de ce nom. Au fait, je suis un homme. Un jeune homme. PlutĂŽt beau ! Je viens de fĂȘter mes dix-sept ans et je suis en premiĂšre au lycĂ©e Saint Joseph. Non, je ne suis pas catholique.Ni chrĂ©tien. En fait, je n'ai pas de religion, mais j'ai foi en Dieu. Je trouve juste que les Ă©glises sont devenues des lieux plus intĂ©ressĂ©s par l'argent que par la spiritualitĂ©. BientĂŽt, il faudra peut-ĂȘtre payer pour entrer dans une Ă©glise ! Bref, je m'appelle Nir Vienne. Mes parents sont un peu fous, je suis fils unique et je suis homosexuel. Je ne suis pas de ceux qui aiment partager leur vie mais bon...
"Alors Vienne ! Comment c'est Vienne ?"
"J'y pense, vu que vous ĂȘtes si pauvre, tu n'y es jamais allĂ©, non ?"
"Tes parents sont timbrés. Qui appelle son enfant Vienne, sérieusement ?" Ces questions fusent tous les jours au lycée, c'est devenu ma routine.
C'est ma vie. On se moque de moi constamment. Je n'ai presque pas d'amis.
Mes amis se comptent sur les doigts d'une main, et encore. Mais bon, j'ai de la chance d'avoir deux amis loufoques. Deux gros malades : Olivia Renault et Aldine Rousseau.
Ils sont mes deux meilleurs potes.
Olivia est richissime (mais on s'en fiche), elle est toujours aussi fauchée que moi. On travaille tous les deux au "Samedi Soir", un restaurant dont le nom reste un mystÚre pour moi.
Je ne sais pas pourquoi la propriétaire l'a nommé ainsi. Ce n'est pas comme si on ouvrait que le samedi soir !
Je suis serveur et Olivia...serveuse. Mais elle n'aime pas ĂȘtre appelĂ©e comme ça. Elle prĂ©fĂšre "aide". "Je suis une aide et pas serveuse." C'est ce qu'elle dit tout le temps.
Aldine, lui, se la coule douce en tant qu'artiste peintre. Enfin, "artiste", c'est un bien grand mot. Ses Ćuvres ressemblent plutĂŽt Ă des gribouillis. Je ne suis pas expert en art, mais ça, je suis sĂ»r que c'est pas de l'art.
Je ne trouve pas de nom pour ce qu'il fait.
Il a une petite amie, ValĂ©rie Weller, une mĂ©tisse amĂ©ricaine aux yeux verts Ă©meraude. PlutĂŽt ronde, mais superbe. Une gentille fille, un peu coquine sur les bords. Elle a percĂ© Ă jour mon homosexualitĂ© avant mĂȘme que moi, je m'en rende compte, et m'a mĂȘme inscrit sur Tinder.
Elle a refait mon look de A Ă Z pour me crĂ©er un profil d'homme musclĂ© et sĂ©duisant en quĂȘte d'une relation sĂ©rieuse avec un homme entre vingt-cinq et trente ans.
Je lui ai demandé de supprimer le compte, mais elle ne l'a pas fait.
Elle dit l'avoir oublié. Mais j'y crois pas trop.
Elle m'a juste donné le code et m'a dit de le faire mais bam... je n'ai pas pu. J'ai pris goût.
Et c'est en découvrant le profil de Dexter Morgan, un beau brun aux yeux bleus, un peu comme John Snow mais en plus beau et plus canon, que j'ai enfin réalisé que j'étais gay.
Alors j'ai pas pu supprimer ce foutu compte. Et voilà comment j'ai été piégé dans cette situation rocambolesque...
Rocambolesque, oui !
Je suis le parfait opposé de ce que Valérie avait créé sur Tinder. Je suis petit. Vraiment petit. Je mesure 1m57, ce qui est aussi grand qu'un hobbit.
Je suis maigre et on peut dire que j'ai l'air d'avoir un rĂ©gime Ă base d'air. Mes cheveux sont longs et emmĂȘlĂ©s, parfois je ressemble Ă un petit troll perdu dans la forĂȘt.
Je suis un introverti professionnel. J'aime rester chez moi, regarder des animes et lire des mangas. Je suis un peu poĂšte, j'ai mĂȘme un million de followers sur ma page Facebook. Oui, un million. Mais bon, je garde un profil bas. Je n'ai pas mis ma vrai photo sur la page car je ne veux pas que les gens me connaissent. MĂȘme mes amis n'en savent rien.
J'ai peur que si les gens savaient. S'ils me connaissaient et qu'un jour je publiait un poÚme qu'ils n'aimaient pas et qu'ils commençaient à me critiquer...
Non, je préfÚre pas. Je préfÚre rester anonyme.
Mais pour une fois, j'ai voulu mettre mon vrai profil, sur Tinder et d'envoyer un message Ă ce Dexter. Chose que je n'ai pas fait.
Toutefois, je lui ai quand mĂȘme envoyĂ© un message et sa rĂ©ponse a Ă©tĂ© cinglante : "Je ne parle pas aux faux profils." Trop facile, j'ai compris que le profil que ValĂ©rie avait crĂ©Ă© ne trompait personne.
Ca se voyait trop que ce n'Ă©tait pas moi. La tĂȘte Ă©tait trop petit. Le corps trop parfait.
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