CHAPITRE 1 : (Marc)
Marc posa sa Bible d’un geste brusque sur le chevet du lit et soupira de colère en pensant au rôle qu’avait joué la femme dans la perte de l’humanité. Si elle n’avait pas désobéi, tous seraient heureux à jamais, il n’y aurait pas eu la mort et surtout, il n’aurait pas perdu de nouveau un patient. Perdre un patient qu’on croyait convalescent, pour un médecin c’était le comble. Aujourd’hui quelqu’un avait rendu l’âme dans sa clinique, et depuis il n’avait pas le moral. Il voulait se réconforter en lisant la Bible, mais il était tombé sur le passage où l’homme désobéissait à Dieu, et celui-ci maudissait la terre.
La femme ! Toujours la femme ! Tout ce qui était mauvais venait de la femme. Heureusement qu’il n’était pas un dieu, il aurait trouvé un moyen adéquat pour que l’homme soit heureux sans cette créature vile. Il fut un temps, où il aurait donné sa vie pour une femme, pour « ELLE », mais la réalité lui avait apparu à un moment. Aucune femme ne valait la peine, elles étaient toutes des créatures infâmes, qui n’avaient qu’une seule chose en tête, assouvir leur désir, prendre plus de l’homme et surtout le laissé tomber bien après en piétinant son cœur sans aucun regret. Les femmes n’avaient pas de regret, elles étaient toutes hypocrites et voulaient diriger le monde. Il voyait de l’exemple partout autour de lui. Elles ne se privaient pas d’utiliser leurs charmes pour obtenir ce qu’elles voulaient. D’autres comme sa mère, ne se cachaient même plus. Elle était l’exemple du féminisme, pensa Marc amer. Cette femme usait de tous les moyens (chantage, menace, manipulation et bien pire encore), pour obtenir ce qu’elle voulait. Il n’avait jamais vu son père prendre une quelconque décision concernant la clinique et les autres entreprises médicales. C’était toujours sa mère. Elle disait qui il fallait voir, qui il fallait fréquenter et inviter. Elle n’acceptait aucun refus.
Mais c’était fini tout cela. Depuis son retour au Cameroun un an et demi plus tôt, il lui avait clairement montré qu’il n’accepterait plus des ordres venant d’elle. Et aujourd’hui il pouvait en être fier. Il était le seul dans son entourage à remettre sa mère à sa place sans battre de cils. Il l’aimait, c’était sa mère, mais il ne supportait plus sa tyrannie. Il ne supportait aucune tyrannie féminine de toute façon. Les femmes n’étaient rien d’autre que des femmes, même ELLE. Surtout ELLE, Sheena Odom. A ce nom, un frisson traversa le corps de Marc malgré la chaleur, et d’un bond, il se leva pour aller sur le balcon de sa chambre.
Il ne fallait pas qu’il pense à elle, elle ne valait pas la peine d’avoir une seule pensée. Ce n’était qu’un monstre et rien d’autre. L’hypocrisie incarnée, malgré la douceur qu’elle manifestait autour d’elle. Simplement de l’hypocrisie. Heureusement qu’il avait vu qui elle était vraiment.
Arrivé au balcon, il admira la vue. De sa chambre située au deuxième étage, il avait une vue admirable. Il n’avait pas à se plaindre, il venait d’une très bonne famille, son père était un grand homme d’affaire, sa mère était sénatrice et lui, il était médecin, à vingt-sept ans. Son frère cadet Jack était ingénieur, sa sœur Nancy était étudiante en Angleterre. Tous les trois étaient des héritiers de la grande famille Mvomo. Il fut un temps, il avait cru être l’homme le plus heureux de la terre, en rencontrant Sheena…
Bon sang ! Pourquoi ce nom revenait tout le temps dans sa tête ? Surtout aujourd’hui ? Il voulait se changer d’idées, penser à autre chose que la mort de son patient, mais voila que cette fille revenait sans cesse dans sa tête. Le téléphone dans la chambre se mit à sonner. Tout en prenant son temps, il entra, puis soupira en voyant le numéro de sa mère. Il ne manquait plus qu’elle pour que sa journée soit un gâchis total. Il savait que s’il ne décrochait pas, elle allait appeler jusqu'à obtenir satisfaction. Avec un gros soupir, il décrocha.
- Oui maman ? fit-il d’une voix impatiente.
- Ah Marc ! J’avais peur que tu ne décroche pas, je me suis dit que tu allais me sortir une excuse plus tard que tu n’avais pas ton téléphone près de toi. Mais voila que tu décroches sans que je n’insiste…
- Maman, je ne vois pas pourquoi je ne décrocherai pas tes appels. Seulement, je suis souvent réellement occupé tu sais.
- Bref, peu importe. Je t’appelle juste pour te demander d’être près, je suis chez toi dans quelques instants…
- Maman, je ne suis pas…
Clic ! Elle avait raccroché. Marc regarda son téléphone ahuri. L’appel de sa mère l’intriguait. D’habitude, elle mettait du temps à discuter en ligne, mais là, cela n’avait fait que quelques secondes. C’était bizarre. A ce moment, il se souvint de ce qu’elle venait de lui dire, elle arrivait chez lui ! D’un geste rapide, il prit sa veste sur le lit, mit ses téléphones dans ses poches, prit les clés de sa voiture sur la table de chevet, et sortit précipitamment de sa chambre. Il descendit les escaliers d’un pas rapide, et entra dans la cuisine où il trouva sa gouvernante.
- Odile, si ma mère me demande, je ne suis pas là. Je déjeune avec des amis.
Il n’avait pas encore fini de donner des instructions à sa gouvernante, que par la fenêtre, il vit le gardien se lever et ouvrir le grand portail. La voiture de sa mère traversa la cour et gara devant la porte d’entrée. Une femme qui paraissait à peine âgée d’une quarantaine d’années descendit de la voiture. En réalité, elle en avait cinquante-cinq ans, mais la chirurgie et les produits cosmétiques lui redonnaient un air jeune. Elle ôta ses lunettes, et jeta un regard détaillant autour d’elle. Vaincu, Marc sorti de la cuisine, et alla accueillir sa mère. Celle-ci le regarda arriver d’un air ironique.
- J’aurais tout parié que je ne te retrouverai plus chez toi, après mon coup de fil.
Ils s’embrassèrent chaleureusement.
- Tu n’as pas totalement tord maman, je vais de ce pas à la clinique.
- J’y sors, et ta secrétaire m’a dit que tu avais annulé tous tes rendez-vous. Alors ne m’invente pas d’histoire. Entrons plutôt, je meurs de chaud. Et dis à ta bonne de nous apporter des rafraîchissements dans le jardin. Et par pitié, qu’elle n’oubli pas les glaçons.
Marc ne parut même pas surpris que sa mère donne des ordres chez lui. Il était habitué, et savait aussi que de sa cuisine, Odile n’avait pas perdu une miette des ordres de sa mère. Tous les deux passèrent par le jardin et prirent place à l’ombre des feuilles de cocotier. Marc avait fait installer des chaises afin de profiter de l’air frais dans l’ombre.
A peine installés, Marc sut que sa mère n’était pas là par hasard. Elle ne se déplaçait jamais pour rien.
- Que me vaut l’honneur de ta visite ? Tu sais bien que dimanche je serai venu pour le dîner hebdomadaire de la famille.
- Ce que j’ai à te dire ne prendra pas trop de temps. Et pour voir mon fils, je n’ai pas besoin d’un jour précis.
Odile arriva avec des boisons, et repartit à l’ instant.
- Que veux-tu me dire ? demanda Marc soupçonneux.
Cela commençait à l’inquiéter vraiment. Avec la présence de sa mère quelque part, il fallait s’attendre au pire.
- Dis-moi, je ne te vois plus du tout avec cette fille qui était venue déjeuner un dimanche avec nous, fit sa mère en portant son verre sur les lèvres.
- Laquelle ? s’enquit Marc. Miss Cameroun ? Oh, c’est fini entre nous.