Cœurs Trompeurs

PVD de Cassandra

Allongée sur mon lit, une casque aux oreilles et les yeux clos, j'écoute une musique classique. J'imite parfois les chansons et des fois, je me laisse simplement immerger dans les paroles de la musique. Écouter de la musique, c'est l'un de mes moments de détente que j'adore. La musique me permet d'oublier un instant mes chagrins les plus profonds, par contre, je ne me vois pas être une artiste musicienne un jour. Non, je suis passionnée de mode et dessiner est une grande passion pour moi. Je rêve d'avoir ma maison de couture, mes mannequins et exercer mon métier de stylisme.

J'entrevois la porte de ma chambre s'ouvrir lentement et je vois ma mère entrer. Je me relève et retire mes casques pendant qu'elle referme la porte derrière elle. Elle avance et vient s'arrêter au milieu de la petite pièce qu'est ma chambre.

___ « J'ai quelque chose d'important à te dire » entame t'elle d'un ton marqué de préoccupation.

À voir l'expression de son visage, j'imagine encore une fois la gravité de notre situation financière. Lorsque ma mère entre dans cette chambre avec un visage inquiétant, alors il y'a vraiment de quoi à se faire du souci.

___ « Je t'écoute maman »

Elle expire bruyamment pour se détendre puis plante son regard dans le mien. Mon cœur bat déjà plus vite et mon estomac se noue de peur de ce qui pourrait s'ensuivre.

___ « Suis-moi, je dois d'abord te présenter à une de mes connaissances » dit-elle.

Je quitte du lit et nous allons au salon. Nous vivons dans un appartement comportant deux chambres, salon avec cuisine ouverte et une douche. Lorsque nous arrivons au salon, j'aperçois une silhouette masculine qui se tient debout au centre du salon. Il est vêtu d'un pantalon blanc repassé, d'une chemise manche longue à rayures et une paire de souliers bien ciré. Aussi une montre marquant la vie de luxe que doit vivre cet inconnu, scintille autour de son poignet.

Je m'arrête juste à l'entrée du salon et observe cet homme dont je n'avais jamais rencontré auparavant. Ma mère le rejoint avec un sourire accueillant et elle l'invite même à s'asseoir sur l'un des fauteuils.

Elle me fait un signe de main après qu'il ait pris une place, m'invitant à les rejoindre. Je déglutis et avance jusqu'à eux.

___ « Bonsoir ! » salue je l'homme de façon polie.

___ « Bonsoir Cassandra » répond-t-il, d'une voix grave et nonchalante, puis plante son regard dans le mien.

Il possède des yeux ronds marrons clairs, des cheveux blonds mi-long et dégradés. Ses cheveux sont attrapés en un chignon et quelques mèches se baladent sur son visage. Il est grand et doit mesurer environ 1m95 et son allure tend vers celle d'un sportif. Son visage en forme de diamant abrite un nez un peu retroussé et des lèvres fines. Il y'a une bosse presque invisible sur son menton.

En dehors de son apparence, cet homme doit avoir la trentaine et dégage une aura écrasante, surtout dangereuse. Le fait qu'il connaisse mon prénom m'intrigue encore plus. Je lance un regard interrogatif à ma mère, qui elle aussi, est tendue.

___ « Cassandra ma fille, assieds-toi ! » me demande ma mère.

Je ne me fais pas prier et vais poser mes fesses sur le canapé et leur fais face. Elle prend une bonne inspiration pour débuter.

___ « Cet homme s'appelle Léonardo Davis, l'un des dirigeants d'une des plus grandes entreprises de fabrication de vin. Nous devons à cet homme un demi million de dollars » m'annonce t'elle.

Cette information vient refroidir mon sang. Je reste immobile sur le canapé, la bouche ouverte mais aucun son ne sort. Ma respiration s'interrompt brutalement puis devient légère.

___ « Quoi ? » m'affole je en me reprenant.

Mon regard se cloue sur elle, cherchant à trouver une lueur de plaisanterie dans cette histoire. Hélas, ma mère baisse son regard et je réalise en ce moment que nous sommes dans une vraie merde. Sans rajouter les autres dettes et dépenses que nous avons déjà.

Un mélange de déception et de révolte m'envahissent. Je pose mon regard blessé sur ce fameux Léonardo, qui reste toujours imperturbable. Mes yeux se ramènent sur la silhouette de ma mère et lorsque nos regards se frôlent, je n'éprouve que de la colère.

___ « Un demi million maman ? » répété je, avec des pleurs étouffés dans le son de ma voix.

___ « Écoute Cassandra, je n'avais pas d'autres choix à ce moment. C'était soit m'endetter ou nous laisser périr de faim » s'explique t'elle.

Je ne fais que secouer la tête, refusant d'accepter cette réalité. Nous avons déjà assez d'ennuis financiers, à savoir le loyer, les factures, la nourriture et toutes ces autres prêts qu'a contractés ma mère à mon insu. Je me lève du canapé et fais quelques allées retours dans le salon, une main frottant mon front.

Je tente de me calmer mais c'est impossible. Je finis par me stopper au milieu du salon et la fixe avec une colère qui pourrait consumer n'importe qui.

___ « Non...non.. non... Tu es allée trop loin cette fois maman. Rajouter une dépense d'un demi million à notre misérable vie, c'est comme nous enterrer six pieds sous terre. Tu comprends ? » m'emporte je en gesticulant.

___ « Maintenant quoi ? Hein Cassandra ? Je suis la fautive ? Avoir emprunté cette somme à Mark pour notre survie était une mauvaise décision ? C'est ce que tu veux essayer de me faire comprendre ? » élève t'elle aussi le ton en quittant sa place.

Ses yeux sont tout aussi rouges que son visage mince. Elle plonge son regard abattu dans le mien et mon cœur se resserre de culpabilité. Mon estomac se noue et je regrette d'avoir monté le ton sur elle alors qu'elle a fait cela pour notre survie, même si les choses deviennent plus compliquées.

Je souffle de frustration et d'épuisement.

___ « Où va-t-on trouver cette somme pour le rembourser ? » lui questionne je, d'un ton faussement calme.

Elle mange le silence pendant quelques secondes puis je la vois tourner légèrement son regard sur Leonardo. Après, elle reporte son attention sur moi, et l'expression de son visage, ne laisse rien espérer de bien. Connaissant ma mère, elle a déjà un plan en tête. Un plan qui risque de me déplaire.

___ « Léonardo a une proposition qui pourrait être bénéfique à tous, surtout à nous. Nous n'avons qu'à accepter sa proposition pour que cette question de dette soit un mauvais souvenir. Aussi, il nous promet une belle récompense si jamais tout fonctionne parfaitement et nous pourrons dire adieu à cette misérable vie que nous menons en ce moment » s'exprime t'elle en toute sérénité.

Je fronce les sourcils, stupéfaite. Pour quelle raison, cet homme serait-il prêt à laisser tomber une telle grosse somme ? Les riches ne font jamais rien pour rien. S'il décide de nous faire don de cette somme, c'est qu'il est sur le point d'avoir plus que ça.

Quelle est donc cette proposition ?

Je croise les bras sur ma poitrine et les regarde avec intérêt.

___ « Quelle proposition ? » questionne je, avec méfiance.

Il se redresse du fauteuil et je l'attends racler sa gorge comme si c'est lui qui prendra la parole. Il me prête son attention et son visage sombre me donne des frissons.

___ « Tu vois Cassandra, j'ai un petit frère qui a hérité de tout ce que mon père nous a laissé...enfin, pas tout. Mais 80% de ses biens sont revenus à mon petit frère, c'est injuste n'est-ce pas ? »

Je ne vois pas d'où est-ce qu'il veut en venir avec cette petite histoire, néanmoins je reste attentive. En plus, je ne comprends pas pourquoi il m'expose ce problème, qui naturellement, doit se régler en famille.

Ne dit-on pas que le linge sale se lave en famille ?

___ « Ça aurait été injuste pour moi si j'avais connu votre père et ses réelles intentions » exprimé je, le fond de ma pensée.

Ses sourcils se rétrécissent et son visage se froisse, comme si je venais de dire un truc qu'il ne fallait pas.

___ « Cassie ? » me gronde ma mère.

___ « Oh, désolée ! » fais-je en levant les mains en l'air.

___ « Continuez monsieur Davis » prie ma mère.

Il prête à nouveau son attention sur moi.

___ « Donc, je disais que mon père a été très injuste avec moi. J'ai besoin de vous pour récupérer ce qui me revient de droit : la moitié de la fortune de mon frère »

___ « Besoin de nous ? Mais, comment pouvons nous vous êtres utiles dans cette histoire puisqu'on n'est pas des avocats ? » rétorque je, choquée qu'il ait besoin de nous pour toucher à ce qu'il lui appartient.

Il lâche un soupir d'irritation. Je détourne mon regard de lui et fixe ma mère. Elle serre ses dents, furieuse que je réplique de cette façon.

___ « Mais j'ai raison, en quoi peut-on l'aider ? Je n'ai pas étudié le droit et toi non plus. On n'a même pas... »

Ma mère ne me laisse pas finir ma phrase, qu'elle m'interrompt.

___ « Il veut que tu épouses son frère » déverse t'elle sous le coup de la colère.

Je hausse les sourcils, sidérée. Épouser son frère ? Mon souffle se coupe pour une seconde et mes jambes se figent au sol, incapable de bouger. Mes pulsations cardiaques augmentent de vitesse, mes poumons se serrent et j'ai dû mal à respirer.

___ « Le petit frère de monsieur Davis s'appelle Santiago et il va effectuer bientôt un voyage d'affaires. Il est célibataire depuis 4 ou 5 mois et durant son voyage, Leonardo va établir un acte de mariage où tu seras légalement sa femme à son insu, sous le régime de biens communs. Après un semestre de mariage, vous allez divorcer. Et tu auras ainsi une part de sa fortune, pour ne pas dire la moitié de ses biens. » m'explique ma mère avec un calme effrayant.

Lorsqu'elle prend une pause et me regarde, je pouffe de rire, tellement que cette histoire est très drôle. Je les vois renfrogner leurs mines d'incompréhension.

___ « Très drôle » dis-je en riant ; « Tu peux être une réalisatrice à Hollywood, crois-moi maman. »

Je cesse de rire et reprends mon sérieux.

___ « Tu es sérieuse là ? Un faux mariage ? Comment s'appelle t'il encore... Santiago ! Vous pensez vraiment pouvoir réussir à berner une personne de cette façon ? »

___ « Tu peux être sérieuse ma petite Cassandra ? Parce que là, ton comportement enfantin commence à me taper sur les nerfs » intervient Leonardo, d'un ton agacé.

Il se lève et fait quelques pas jusqu'à mon niveau. Il pointe son regard sombre dans le mien et un frisson intense parcourt mon échine.

___ « Santiago sera victime d'un grave accident. Le but c'est qu'il ne s'en sorte pas mais si jamais sa vie se prolonge, alors il se peut que cet accident lui cause une perte de mémoire pour une longue période. Nous allons ainsi profiter de cette occasion pour te faire passer pour sa femme. En ce moment, il ne se rappellera plus de rien ou il sera déjà mort. Évidemment qu'il aura quelques doutes si jamais il survie mais avec l'acte de votre mariage, le maire, il finira pas l'accepter ou peut-être non » m'explique t'il lentement et froidement.

Il souffle.

___ « Au quatrième mois de votre mariage, vous allez divorcer. Tu l'emmènes à te demander le divorce et la moitié de sa fortune te reviendra pour. Ça c'est juste une couverture. » souligne t'il sa dernière phrase avec un sourire mesquin ; « Mais en réalité, elle sera à moi. Ta mère et toi, aurez aussi un bénéfice : une maison à votre nom, vos dettes et anciennes factures réglées, un compte bancaire avec une somme suffisante pour recommencer une nouvelle vie » conclut-il.

Je n'arrive toujours pas à croire à ce que j'entends. Il a l'air sérieux et déterminé dans ce plan de ruiner son petit frère. J'ai déjà une idée de la raison pour laquelle, leur géniteur ne lui a rien légué. Parce qu'il faut être dépourvu d'un cœur pour agir de la sorte envers son frère.

___ « Et si je refuse cette proposition ? »

Je vois les sourcils de ma mère se relever quand je pose cette question. Léonardo rigole légèrement puis se rapproche encore plus de moi. Un rictus se dessine sur ses lèvres et son visage devient plus terrifiant qu'il ne l'était.

Il ramène quelques mèches de cheveux derrière mon oreille et le contact de ses doigts avec ma peau nue me fait frissonner, comme un choc électrique. Il retire ses doigts de mes cheveux et rapproche ses lèvres de mon oreille.

___ « Tu as le choix, tu sais Cassie » renchérit il ; « Si tu refuses, alors vous vous débrouillez pour me rembourser mon argent dans les prochaines 24 heures. Aussi, avec un taux d'intérêt de 30 % ou rendez-vous devant le juge pour un procès où je vous accuserai d'escroquerie. Et je ferai tout pour que toi et ta mère pourrissent en prison alors qu'il y'avait un autre choix de vie pour vous .» me nargue t'il.

J'écarquille les yeux quand je l'entends mentionner le taux d'intérêt que nous devons lui donner en plus de la dette et ce qu'il prévoit déjà pour ma mère et moi, si je refuse.

___ « Par ailleurs si tu acceptes, tu connais déjà les avantages que ta mère et toi, bénéficieront » continue t'il.

Il se recule de moi avec toujours le mauvais rictus sur son visage. Mon estomac se retourne dans mon ventre et j'ai envie de vomir, rien que voir la tête de ce type.

___ « Réfléchis bien Cassandra ! »

Il se tourne vers ma mère et incline faiblement sa tête à titre de salutation. Puis, il me fait un sourire hypocrite avant de prendre la porte.

Quand j'ai entendu la porte claquée derrière moi, je lâche un soupir bruyant pour décompresser mes poumons et reprendre le cours normal de ma respiration.

À suivre...