Clarisse, une jeune interne pleine d'ambitions, arrive dans un hôpital où les rumeurs sur les relations entre internes et résidents sont légion. Déterminée à ne pas répéter les erreurs de ses prédécesseurs, elle se promet de résister aux avances des résidents, surtout celles du séduisant résident chief en gynéco-obstétrique. Cependant, malgré ses résolutions, Clarisse se retrouve irrésistiblement attirée par lui. Entre désir, culpabilité et peur de l'exploitation, elle devra naviguer dans un univers hospitalier où les apparences sont souvent trompeuses. Pourra-t-elle préserver sa carrière et son cœur tout en cédant à ses sentiments ?
Clarisse Lafleur
Le bip incessant de mon réveil me tira brutalement de mon sommeil. Un nouveau jour commençait, un nouveau défi à relever. J'enfilai mon scrub, encore trop grand, et me dirigeai vers le service dans lequel je suis affecté ce mois-ci. L'atmosphère était tendue, les regards se croisaient, chacun semblait absorbé par ses propres préoccupations.
Dans chaque service la première semaine est toujours le plus dur, dit-on. Les blouses blanches immaculées semblaient flotter autour de moi comme un linceul. L'hôpital, avec ses couloirs interminables et son odeur caractéristique de désinfectant, m'oppressait déjà. Loin de chez moi, de ma vie tranquille. Ici, tout allait cent fois plus vite que d'habitude. Les enjeux étaient plus élevés.
Depuis toujours, j'avais rêvé de ce moment. Être médecin, soigner les autres, c'était ma vocation. Moi au chevet d'un malade est une sensation tellement.. C'est énorme... indescriptible. Cela dit, la réalité du terrain est bien différente de ce que l'on pouvait lire dans les livres.
Mon premier jour fut un véritable baptême de feu. Pire encore, je m'étais retrouvé aux urgences pour mon premier service. Les aînés ne m'épargnaient pas, me confiant les tâches les plus ingrates. J'essayais de me montrer appliquée, de ne pas commettre d'erreurs, mais la pression était immense.
Les regards insistants des résidents, les blagues douteuses, tout cela me mettait mal à l'aise. Et puis, il y avait lui. Le résident chief d'un autre service, avec son charme désarmant et son air de séducteur invétéré. Je ne savais rien de lui. Même pas son nom. Mais une chose était sûre, je savais que je devais me méfier de lui. Car, à première vue, il y avait quelque chose en lui qui m'attirait irrésistiblement. Et je n'étais pas là pour ça.
- Principe pour l'internat. Ne jamais coucher avec un résident ou un titulaire, elle me mit en garde.
Face à son sérieux, je souris.
- C'est sérieux ce que je dis Clarisse. C'est la règle ultime dans ce milieu.
- Où veux tu que je trouve du temps pour batifoler avec un supérieur ? Cela ne risque pas de m'arriver, je lui avais rassuré.
J'avais beau me répéter que je n'étais pas comme les autres et que je ne me laisserais pas séduire, une petite voix au fond de moi me disait le contraire. Dès mon premier jour, j'avais été mise à l'épreuve. Entre ce que je pensais et la réalité, je me sentais prise au piège. Ce fut le début d'un affrontement entre mon désir de réussir et ma peur de me faire avoir.
Durant ce premier mois, une chose m'a aidé. Nos deux services ne partageaient pas le même bâtiment. Avec la chance que j'ai, il a fallu que mon deuxième service soit exactement celui qu'il dirige.
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Un deuxième mois venait de commencer. Aujourd'hui, c'est mon premier jour en OBGYN. Leur bâtiment est un peu détaché des autres. L'odeur antiseptique, mêlée à celle du café noir que les résidents avalaient pour rester éveillés en enchaînant les gardes, me rappela que j'avais choisi une voie où la fatigue et le stress faisaient partie du quotidien.
Alors que j'arrivais à l'accueil, mon regard se pose sur lui encore une fois. Le Dr. Daniel Saint Juste, résident en troisième année, chef des résidents se tenait là, concentré sur son dossier. Il était grand, avec des traits, je suppose marqués par les longues heures de garde. Mais ses yeux, d'un brun profond, dégageaient une certaine douceur. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine. Je m'approchai de là où il était, espérant capter son attention, mais lorsqu'il leva les yeux vers moi, ce fut comme si je n'existais pas.
Son regard passa sur moi sans s'arrêter, comme s'il m'avait à peine remarquée. Il retourna immédiatement à ses papiers, me laissant avec un sentiment d'invisibilité qui m'écrasa sur place.
Je rejoignis mes collègues internes, le cœur lourd. L'un d'eux, Jacques, remarqua mon trouble.
- Tu as l'air ailleurs, me fit-il remarqué avec le sourire. Tout va bien ?
Je secouai la tête, tentant de masquer ma déception.
- Oui, oui, juste un peu... nerveuse. Je suppose que ça passera.
Sarah, une autre interne, se pencha vers moi, chuchotant :
- Écoute, je sais que le Dr Saint Juste peut être impressionnant, mais un conseil d'ami, ne te laisse pas embarquer dans cette histoire d'interne qui font clic-clic avec un moniteur. Les résidents, surtout ceux comme lui, ont la tête ailleurs. Ils n'ont pas le temps pour des distractions... ou pour nous. Sans conter qu'il doit déjà avoir une famille.
Je feignis un sourire, mais au fond de moi, quelque chose s'était déjà réveillé. Une curiosité, un désir, peut-être même une attirance pour cet homme qui m'avait ignorée avec une telle indifférence. Pourtant, les paroles de Sarah restaient gravées dans mon esprit. Les histoires d'internes qui s'étaient brûlés les ailes en se rapprochant des résidents étaient nombreuses, et je savais que je devais me concentrer sur ce pourquoi j'étais là : apprendre, et surtout, survivre à cette année d'internat.
De plus, j'avais entendu dire qu'après la pédiatrie et l'orthopédie que c'était l'un des services les plus exigeants de l'hôpital. Je me demandais si je serais à la hauteur.
- Vous êtes combien ?
- 8, répondit le major de groupe.
- Bien. Vous allez vous diviser en 3 sous groupe, ordonna le résident chief. Comme vous n'êtes que 8, celui du major aura 2 personnes. Chaque sous groupe devra gérer un secteur. Vos gardes seront organisées en fonction de cela.
Sa voix, ses yeux, son sourire naturel, son charme, son charisme, son charme, me captiva. Mon cœur battait à tout rompre. Tout à coup, je me sentais à la fois attirée et intimidée par cet homme qui m'a été présenté plus tôt dans la journée, lorsque notre groupe avait été accueilli dans le service. Il semblait si sûr de lui, si à l'aise dans cet environnement que je trouvais si oppressant.
- Ferme ta bouche, dit Sarah. Tu risques d'avaler une mouche.
Je le fusille du regard et je rejoins mon secteur. Les sous groupe déjà formés, je me retrouvai avec 2 autres internes. Ensemble, on se mit d'accord sur le partage des tâches.
De toute la journée, j'essayais de me montrer efficace. Mais, mes pensées étaient ailleurs. Je revoyais le résident chief, son sourire, son regard... C'était si inhabituel de ma part de me laisser captiver autant par quelqu'un. Ce qui m'a valu d'enchaîner bourdes après bourdes.
Les jours passaient et je devenais accro à lui. Je cherchais le moindre occasion de me mettre à côté de lui, m'efforçais de trouver son regard, guettait ses moindres faits et gestes. Allant jusqu'à me demander si j'étais vraiment en train de tomber amoureuse de lui, ou si c'était simplement l'effet de son manque d'intérêt pour moi.
Un soir, après une journée particulièrement éprouvante, Je me retrouvai seule dans la salle à l'accueil. Je ressors mon téléphone, active la caméra et regarda mon reflet. L'image que je vis est bien différente de la jeune femme pleine de vie que j'ai toujours été. Ce jour là, j'étais si fatiguée. Le regard assombrit par des cernes, je ne ressemblais à rien.
Le brouhaha des machines dans la pièce d'à côté, les appels des infirmières, malgré que j'en étais à mon deuxième mois d'internat, je ne m'étais pas encore habituée à tout cela. Le regard des autres internes me mettait encore plus mal à l'aise. J'avais à peine eu le temps de poser mon sac que l'infirmière-chef m'interpellait déjà, me confiant une tâche urgente.
Je me précipitai, les jambes lourdes, le cœur battant la chamade. Chaque seconde semblait une éternité. J'avais l'impression de courir après mon ombre à bouger partout et tout le temps.
- C'est qui les résidents de garde pour ce soir ?
- Dr Joseph comme résident un, Dr Pierre et le Dr Saint Juste.
Mon cœur bondit dans ma poitrine lorsque son nom est mentionné. Je me remettais à peine de mes émotions lorsqu'il fit son entrée dans la pièce où nous étions. Passant une main dans mes cheveux, j'espérais réussir à soigner mon apparence. Pour le nombre de fois où je suis arrivée dans le service étant en bombe, il fallait que l'on soit l'un en face de l'autre maintenant que je ressemble à une clocharde.
J'étais inconfortable tout à coup. Alors que lui, comme s'il avait toujours évolué dans un tel environnement, s'exprimait une aisance déconcertante. Il donnait ses ordres d'une voix calme et assurée, tandis que les autres acquiesçaient sans broncher. Je l'observais en secret, admirative et envieuse à la fois. Il incarnait tout ce que j'aspirais à devenir : compétent, respecté, en contrôle. Mais je savais aussi que ce monde était impitoyable, et qu'il fallait se méfier des apparences.
Le Dr. Saint Juste, toujours aussi sûr de lui, figure d'autorité indéniable, me fixait intensément. Mais ce soir, il semblait différent. Beaucoup moins inaccessible. Pour la première fois, je percevais autre chose que la façade qu'il montrait toujours. Peut-être étais-je en train de me faire des idées, à trop le surveiller du coin de l'œil.
- Qui peut me dire ce que signifie RPM.
- Rupture prématuré des membranes, répondis-je.
- Et c'est quoi ? Il continue de nous questionner.
Personne ne répondit. Trop impressionné par le Dr Saint Juste, je suppose.
- Alors Lafleur. Tu en as une idée ?
"Il a retenu mon nom, me répétais-je silencieusement, folle de joie.
- Lafleur ! Il prononça de nouveau.
La nuit était tombée sur l'hôpital, mais l'agitation ne faiblissait pas pour autant. Chaque pas résonnait dans les couloirs vides, une sorte de mélodie inquiétante qui accentuait mon malaise. Je n'avais jamais ressenti une telle tension. Le silence extérieur contrastait avec le tumulte intérieur que je vivais.
- La rupture prématurée des membranes désigne la rupture du sac amniotique avant le début du travail. Cela peut être pré-terme ou à terme. Normalement, il existe plusieurs causes.
Pour la première fois, son sonrire m'étais adressée. Mon cœur était en ébullition. Je faisais tout pour ne pas le montrer. Les heures passèrent et je continuais à m'activer, essayant de ne pas trop penser à lui, mais c'était impossible.
Chaque mouvement qu'il faisait, chaque mot qu'il prononçait, capturait mon attention. Il semblait tellement en contrôle, alors que moi, je peinais à suivre le rythme.
Soudain, une urgence arriva. Une femme en travail. C'était une ancienne césarisée et son état était critique. Mon cœur battait à tout rompre alors que j'essayais de me concentrer sur ce que je devais faire. Aussitôt on s'était préparé pour la SOP. Daniel dirigeait l'équipe avec une maîtrise incroyable. Sa voix, ferme et rassurante nous expliquait chaque étape. Je ne pouvais m'empêcher de le regarder, fascinée par son calme, même dans les moments les plus stressants.
Lorsque l'intervention se termina, je sentis son regard se poser brièvement sur moi. Pour la première fois, j'avais l'impression qu'il se rendait compte de ma présence. Ce n'était qu'un instant, une fraction de seconde, mais cela suffit à éveiller une nouvelle vague de sentiments en moi. Avait-il remarqué mes efforts, ou était-ce simplement mon imagination ?
Alors que je reprenais mon souffle, le Dr. Saint Juste s'approcha de moi. Mon cœur s'accéléra à mesure qu'il s'approchait. Mais au lieu de m'adresser la parole, il me tendit un dossier avec une expression neutre.
- Lafleur, tu pourras me faire un résumé de ce cas pour demain matin, s'il te plaît ? Dit-il simplement.
Je pris le dossier, déconcertée.
- Oui, bien sûr, je vais m'en occuper.
Il hocha la tête sans un mot de plus et se retourna pour partir, me laissant seule avec mes pensées. Une partie de moi était déçue, mais une autre était soulagée. Peut-être qu'il valait mieux que les choses restent ainsi.
Mais alors que je me dirigeais vers la salle de repos pour travailler sur le dossier, je ne pouvais m'empêcher de penser à ce que Sarah avait dit. Était-ce vraiment une bonne idée de nourrir cette attirance pour lui ? Je savais que je devais me concentrer sur ma carrière, sur mon avenir, mais chaque fois que je le voyais, je sentais mes résolutions vaciller.
Cette nuit-là, je me plongeai dans le dossier, essayant d'oublier le Dr. Saint Juste, mais ses yeux, son sourire, et cette indifférence qui me hantait, continuaient de décider de mes émotions.
C'était peut-être ça, le vrai défi de mon internat : apprendre à naviguer dans mes émotions tout en restant professionnelle. Mais plus les jours passaient, plus je réalisais que ce ne serait pas aussi simple que je l'avais imaginé.
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