Daisy, une trentenaire ayant du mal à jongler entre son rôle de femme, d'épouse et de maman. Elle se demande comment faire pour être heureuse et plus seulement dépassée par les événements. Elle veut être actrice de sa vie et non plus spectatrice... Comment va-t'elle s'y prendre ?
Un vendredi de janvier sombre et froid.
La nuit est déjà tombée et la neige est là. On redoute un épisode comme la semaine précédente qui a fermé les écoles et paralysé le pays. Des kilomètres de bouchons, des gens obligés de dormir dans leur voiture, pénuries de chauffage et d'électricité...
J'étais d'ailleurs tombée sur une vidéo de nos cousins Canadiens qui tournait sur Facebook. Ils étaient pris d'un fou rire en regardant les actualités chez nous et ne comprenaient pas que 3 cm de neige pouvaient créer autant de dégâts.
En même temps, ce n'est pas comme si on était habitué à ce genre de situation.
Mon mari est rentré de l'école et était en pleine session devoirs avec les enfants.
J'étais en formation aujourd'hui, je rentre donc plus tard que d'habitude, la tête pleine de législation, clairement je suis contente de rentrer.
Au détour de la rue, j'aperçois ma maison de lotissement, notre maison que nous avons acheté avant la naissance des enfants. Une maison blanche aux volets bleus avec 3 chambres, une bibliothèque, un jardin et un garage. Une maison qui nous prend beaucoup de temps et d'argent mais c'est notre chez-nous, notre foyer. Il fait déjà nuit.
Le lampadaire qui est en face est allumé, une lumière chaude, réconfortante, signe que l'hiver bat son plein et que les jours sont courts.
En rentrant j'embrasse la troupe attablée dans la salle à manger avec Ratus et les tables de multiplications, je pose mon sac sur une chaise libre, j'enlève mon manteau qui aura le dossier de cette fameuse chaise en guise de portemanteau et direction les fourneaux.
Au bout d'une heure de taillage des légumes, de cuisson et d'écrasé de pomme de terre avec saumon enfourné en papillote, je sers ce repas sain et équilibré avec un dressage d'assiette digne de chez Flunch pour m'entendre dire un « j'aime paaaaaaas » et un « j'aime pas le poisson, c'est dégoûtant, ils font pipi dans la mer et ils vivent dedans ».
Je m'entends répondre à ma progéniture que faire pipi dans l'eau du bain et ensuite la boire n'est pas génial non plus...
La menace du « si les assiettes ne sont pas finies il n'y aura pas de dessert » fonctionne quand même et heureusement je n'avais ni l'envie ni le courage de me battre. Et qui suis-je pour rivaliser avec la mousse au chocolat ?
Viens ensuite l'heure tant attendue et redoutée, celle de la mise au lit ! Après qu'ils ont essayé de négocier pour rester dans le salon parce que « j'ai peur », « j'ai pas envie d'aller me coucher », « je suis pas fatigué » et autres joyeusetés, ils sont enfin couchés.
Ah non, fausse alerte, ils ont oublié : d'aller se brosser les dents, d'aller faire pipi, de dire bonne nuit, de faire un bisou, de faire un câlin, de résoudre le théorème de Pythagore... ordre non exhaustif.
Bref, à un moment, je me retrouve à décortiquer les crevettes sur la table de la salle à manger pour le repas du lendemain midi pendant que Monsieur regarde la télé, allongé dans le canapé.
Et du coup je réfléchis...
Je me demande depuis combien de temps je ne suis pas allée chez le coiffeur, depuis combien de temps je ne me suis pas maquillée, depuis combien de temps je ne me suis pas faite belle juste pour le plaisir.
Je me demande aussi, si mon amoureux me désire toujours autant.
Ce n'est pas la traditionnelle levrette du vendredi soir et/ou le missionnaire du dimanche matin qui m'aide à me sentir épanouie... Quand on arrive à aller jusqu'au bout parce que les gosses ont un sens extrêmement précis du timing. Le vomito / cauchemar / pipi au lit / bruit bizarre arrive toujours au moment où je suis sur le point de jouir. Mon désir, mon envie prend la poudre d'escampette en même temps que la porte de notre chambre s'ouvre et que ma frustration grandit.
Et la fatigue de remettre ça, la peur d'être dérangée de nouveau, l'impression de ne plus être sur le même rythme, de ne plus être en phase.
Mais Gauthier dans tout ça, est-ce qu'il me trouve toujours à son goût ? Quand il m'a rencontrée je rentrais dans une taille 38, neuf ans de mariage, quinze ans de vie commune, deux grossesses et 30 kilos de plus...
La vie que nous avons construite est magnifique, mais est-ce que ça me suffit ?
Et là, je me lance, sans réfléchir et sans me douter du cataclysme que cela va engendrer :
Chéri ?
Hum ?
Ça te dirait qu'on devienne un couple libre ?
Je pense que si je lui avais mis un double kick dans le visage il aurait eu une expression moins ahurie que celle qui s'est affichée à ce moment-là.
En voyant sa réaction je me sens honteuse, j'ai envie de me transformer en fourmi, ou en pou, ou en acarien, enfin le truc le petit qui soit et de disparaître ou alors de remonter le temps...
Mais je me rends à l'évidence, n'ayant aucune connaissance en physique quantique ni l'option 1 ni l'option 2 ne sont possibles.
Aurais-je profondément blessé l'amour de ma vie ? Comment vais-je pouvoir faire pour rattraper ma connerie ?
Est-ce si étrange de vouloir ou d'espérer un nouveau souffle dans notre vie ?